Hockey Canada : la purge s’est avérée

Yves-François Blanchet, député fédéral de Chambly, n’entretient pas de nobles sentiments à l’égard de l’ancien conseil d’administration de Hockey Canada (HC), qui vient de démissionner en masse.

« Il y a des gens (de HC) pour qui j’avais des mots si durs que mes conseillers m’ont dit de ne pas dire en public […] Le départ de ces gens est tout à fait salutaire », lance d’entrée de jeu Yves-François Blanchet. La pression a fini par faire sauter la soupape. C’est un coup de balai attendu qui vient d’être passé à HC. Scott Smith, président du conseil d’administration, et la totalité du conseil de HC ont annoncé leur démission la semaine dernière.

« Ça donne la chance de repartir à neuf avec un nouveau CA », convient de son côté Christian Renaud, président de l’Association de hockey mineur de Chambly.

« Il y a des gens (de HC) pour qui j’avais des mots si durs que mes conseillers m’ont dit de ne pas dire en public. »
– Yves-François Blanchet

Viol collectif

En avril dernier, la présumée victime d’un viol collectif a déposé une poursuite de 3,55 millions de dollars en dommages et intérêts contre HC, la Ligue canadienne de hockey et huit joueurs de la formation nationale junior de 2018. En mai, HC a tenté de balayer l’affaire sous le tapis et a réglé à l’amiable la poursuite de la présumée victime pour un montant inconnu. Puis, plus tard dans ce même mois, les détails de l’agression sexuelle alléguée et du règlement à l’amiable sont sortis au grand jour.

Laurence Boivin est une gardienne de but chamblyenne de 17 ans. À son âge, elle fait partie de l’élite des gardiennes de but au pays. Elle a été la dernière retranchée d’Équipe Canada à sa position pour participer au Championnat mondial féminin des M18 2022, qui s’est déroulé cet été au Wisconsin, aux États-Unis. Lors du camp d’entrainement, en mai dernier, en amont du Championnat, l’histoire scabreuse sortait dans les médias.

« Le côté féminin de HC nous a immédiatement rencontrées, rappelle-t-elle. Elles ne sont pas en contact avec le côté masculin et n’avaient aucune idée de ce qui s’était passé. » Les joueuses se sont fait demander de prévenir au moindre geste inacceptable. « C’était une surprise. Ça a vraiment été caché. On voit que l’on a besoin de
changement », complète la sportive, qui a fait son hockey mineur à Chambly.

Frais d’inscription vers Hockey Canada

Pour l’entente à l’amiable, l’argent est notamment venu des poches des familles canadiennes, à leur insu. Une partie des frais d’inscription des jeunes joueurs de hockey a servi à créer une volumineuse réserve financière connue sous le nom de Fonds national d’équité.

Celle-ci sert à couvrir les réclamations pour agression sexuelle et autres poursuites judiciaires. Puis, un second fonds découlant du premier a été révélé : le Fonds en fiducie pour l’héritage des participants. Il peut également être utilisé dans des cas d’abus sexuel.

« Ce sont des gens qui cachaient un fonds créé pour acheter le silence de victimes d’actes criminels », s’indigne Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois. « Comme tout le monde, nous avons été surpris de cette gestion. Nous allons espérer une plus grande transparence », précise M. Renaud.

Squelettes dans le placard

Il aura fallu que l’ancien CA de HC se voit mis au pied du mur pour que suinte la plaie et que des révélations semant l’indignation collective s’écoulent. Est-ce que d’autres squelettes traînent dans le placard du défunt CA? « Ça ne nous dit pas tout ce qui s’est passé auparavant », mentionne M. Blanchet. Il ne considère pas l’État désormais libre de ce passé et voit la nécessité d’une enquête en profondeur. « L’enquête révélera si des gestes doivent être posés par rapport aux anciens administrateurs », ajoute-t-il.

La sacro-sainte LNH

Confortablement installées dans ce que certains ont qualifié de tour d’ivoire, les têtes dirigeantes de HC rendaient peu de comptes à la population qui engraisse ses coffres. « Ils se considèrent comme une pépinière de la sacro-sainte Ligue nationale de hockey (LNH). Je suis convaincu que la LNH est aussi outrée et fâchée que moi là-dedans », mentionne M. Blanchet. Il voit en HC un manque flagrant de toute compassion ou de jugement relativement à sa mission, qui devrait en être une formatrice permettant d’inculquer des valeurs aux jeunes hommes pratiquant le sport. « Cette construction fondée autour de l’élite a quelque chose de profondément choquant. HC et Hockey Québec doivent s’assurer d’être proche des très nombreux parents », complète le député de Chambly.

Couper les vivres

Tôt dans le processus, la ministre des Sports, Pascale St-Onge, avait annoncé un gel du financement de Hockey Canada. La Banque Scotia avait décrété la suspension de sa commandite à Hockey Canada. Canadian Tire et TELUS avaient retiré leur soutien au Championnat du monde de hockey junior. Tim Hortons et Esso s’étaient aussi inscrites aux entreprises retirant leurs commandites à Hockey Canada. Tout dernièrement, Hockey Québec et la Fédération de hockey de l’Ontario ont suspendu leurs cotisations à Hockey Canada. « Hockey Québec a été proactif dans cette situation. Il a été un leader dans cette pression envers Hockey Canada. On a suivi ce que Hockey Québec a fait », termine Christian Renaud.