Expédition, en rémission du cancer

La Chamblyenne Félycia Salvail revient d’une expédition d’aventure thérapeutique liée à son cancer, en compagnie d’autres jeunes d’un peu partout au pays, qui, comme elle, sont en rémission de cancer.

La jeune femme de 18 ans a amorcé son périple en se disloquant l’épaule. C’est en soulevant un sac trop pesant qu’elle a subi cette blessure. Du 10 au 17 mars, c’est plus d’une trentaine de kilomètres que la citoyenne de Chambly en rémission d’un lymphome de Hodgkin stade 4 a su franchir, malgré l’obstacle supplémentaire.

Armée de résilience, elle s’est attaquée à la randonnée organisée par la Fondation Sur la pointe des pieds. Au programme : excursion en raquette et ski-hok, camping d’hiver, atelier de survie en forêt, mais surtout, riches échanges alimentant espoir et solidarité.

L’expédition

Félycia Salvail, suivie à l’hôpital Charles-Le Moyne, se joint à un groupe de 14 jeunes adultes âgés dans la vingtaine. Tous prennent le train de Montréal, direction la Seigneurie du Triton, dans l’arrière-pays de la Mauricie. Accompagnés d’une équipe médicale et de facilitateurs de la fondation, ils s’apprêtent à vivre bien plus que des sorties de plein air.

En effet, l’expédition se veut l’occasion pour les participants de côtoyer d’autres jeunes qui partagent les mêmes réalités, d’échanger, de se comprendre et de tisser des liens d’amitié tout en relevant un défi hors du commun. « Ça a vraiment fait du bien. À l’hôpital, c’est juste des personnes âgées. Oui, on vit la même chose, mais pas au même moment », nuance celle qui a pleinement savouré de se mêler à cette tranche humaine correspondant à son âge.

Lors des deux premiers jours, Félycia parcourt deux kilomètres quotidiennement. Après cet échauffement, un plus grand défi l’attend alors qu’elle enchaîne un 8 kilomètres, suivi de 12 supplémentaires dès le lendemain. Le groupe dort à l’extérieur dans des tentes hivernales ou dans des cabanes de pêcheurs. Conséquemment, davantage de millage s’ajoute au compteur pour la route du retour.

Félycia le concède, elle n’est pas sportive. Pour elle, c’est tout un exploit qu’elle a réalisé. « J’aime beaucoup l’extérieur. J’adore voyager et rencontrer de nouvelles personnes. Quand j’ai su que ça (l’expédition) existait, c’est sûr que j’allais le faire », dit celle qui étudie pour devenir technicienne en éducation spécialisée.

La Chamblyenne a pris connaissance de la fondation quelque temps après avoir reçu le diagnostic, le 17 mai 2022. Elle cherchait des organismes qui aident les jeunes. « J’ai vu LEUCAN, j’ai vu la Fondation Louis-Philippe Janvier, puis j’ai découvert la Fondation Sur la pointe des pieds », récapitule Félycia. La distinction avec ce dernier organisme, c’est qu’il soutient non pas à travers des ressources financières, mais plutôt en proposant de vivre une expérience humaine.

Introvertie de nature, Félycia a notamment profité de l’expérience pour s’extérioriser et tisser des liens. « On était une grande famille. Tout le monde prenait soin de tout le monde », exprime Félycia, qui a forgé des amitiés durables. Outre le dépassement de soi, c’est une immersion culturelle qu’elle a vécue. Entre jeunes adultes québécois, ontariens, albertains, britanno-colombiens et yukonnais, les langues française et anglaise se sont ralliées pour franchir les étapes.

Expéditions thérapeutiques

Ces expéditions d’aventure thérapeutique, orchestrées par des professionnels du milieu de l’Intervention par la nature et l’aventure (INA), demandent des mois de planification. Non seulement doit-on s’assurer que le niveau de difficulté est adapté au groupe et aux éventuelles limitations physiques des participants, mais les facilitateurs doivent aussi prendre le pouls
de ceux-ci.

« Lorsqu’on arrive sur le terrain après plusieurs mois de planification, on a évidemment un scénario A en tête. Mais en contexte de nature et d’aventure, il y a un paquet de facteurs que l’on ne contrôle pas, dont la météo, le groupe et l’énergie qu’il dégage », résume l’une des facilitatrices.

Ajustement en temps réel

Tout au long de la semaine, ils ont dû ajuster et adapter l’itinéraire, l’horaire et les activités pour atteindre les objectifs du programme d’intervention et répondre aux besoins des participants. « Chacune des décisions que l’on prend sur le terrain est prise en considérant plusieurs facteurs pour nous assurer un succès sur tous les plans à la fin de l’expédition. Il se peut qu’au final, nous n’aurons pas atteint le sommet ou franchi la distance prévue, mais ce n’est pas là notre objectif principal. Nos expéditions sont un moyen de parvenir à d’autres fins », nuance la facilitatrice. Il est ici question d’échanges entre les participants, de développement de confiance en soi, d’immersion en nature et de plaisir qui « sont d’autant plus importants pour nous que la destination finale ».

Cet hiver, en équipe avec les gens de la Seigneurie du Triton, la Fondation est parvenue à rassembler tous les éléments nécessaires à l’atteinte des objectifs de son programme avec « en bonus, la réalisation du plan de match initial! ». La Seigneurie du Triton s’est révélée un site des plus « adéquats » pour permettre aux jeunes de regagner leur estime de soi en se dépassant. Isolés du reste du monde, au cœur de la forêt boréale, les jeunes sont parvenus à faire une coupure avec leur quotidien. Ils y ont vécu une véritable connexion avec la nature et avec eux-mêmes.

De retour à la maison, Félycia affirme que l’expédition lui a fait comprendre « qu’il faut qu’elle essaie de nouvelles choses, que la nouveauté ne tue pas et qu’elle est forte, autant physiquement que mentalement. Que de prendre confiance en elle est nécessaire et que les erreurs sont permises. Que vivre de la tristesse est normal et ça ne fait pas d’elle quelqu’un de faible, bien au contraire », résume de son côté la Fondation Sur la pointe des pieds.