« Les sacrifiés de la COVID »

À la mi-avril, Éric Duhaime a remporté la course à la chefferie du Parti conservateur du Québec (PCQ), obtenant 95 % des voix. De passage à Chambly dans le cadre de sa tournée à travers le Québec, le Journal de Chambly s’est entretenu avec celui qui tentera de mousser sa candidature en vue des élections provinciales en octobre 2022.

Quelles sont les motivations derrière votre retour en politique?

Je ne serais pas revenu en politique s’il n’y avait pas eu la crise sanitaire. Ça a été l’élément déclencheur. J’ai toujours tenu pour acquis qu’au Québec, nos droits individuels, nos libertés, notre démocratie étaient quelque chose de fondamental. J’ai vu que ces droits étaient très fragiles et que le gouvernement pouvait se les accaparer […] je ne pensais pas que le gouvernement pouvait m’empêcher d’aller souper avec ma mère, de travailler, de sortir après 20 h, etc. J’ai vu ça dans des régimes qui n’avaient rien à voir avec la démocratie, et les trois parties à l’opposition n’ont pas offert d’opposition, en fait. Je me suis toujours battu pour les droits individuels. C’était donc normal pour moi de revenir en politique dans les circonstances.

Depuis l’automne dernier, le PCQ est passé de 700 à 15 000 membres. Comment expliquez-vous cette recrudescence?

Je dirais le vide politique. Je m’adresse aux sacrifiés de la COVID, ceux que le gouvernement a oubliés. Le gouvernement était obnubilé par le nombre de cas quotidien et a oublié de parler des enfants qui ont un taux de décrochage record, de la détresse psychologique, des PME qui ne passeront pas au travers quand l’aide gouvernementale cessera, des travailleurs qui vont perdre leur job, etc. Moi, c’est à ces gens-là que je veux parler pour qu’ils aient une voix politique. On est leur porte d’entrée à l’intérieur du système.

Les mots ‘’Parti conservateur’’ peuvent être associés à ‘’rétrograde, aux idées arrêtées, peu ouvert’’. Est-ce une perception que vous ressentez et est-ce une image que vous souhaitez changer?

On associe le parti aux Anglais de l’Ouest canadien et on oublie que le parti était d’abord et avant tout Québécois. Certains disaient qu’il faudrait peut-être changer le nom du parti et j’ai fait partie de ceux qui s’y sont opposés […] les éléments religieux, le conservatisme social, même anglophone ne me font pas peur. Je suis ouvertement gai, et, par ma vie, je ne fais pas partie du conservatisme social. Nous avons refait le logo, qui est une fleur de lys montrant clairement notre appartenance au Québec d’abord. J’ai aussi promis, dans la course, de prendre un virage nationaliste.

Quelles sont les idées principales qu’Éric Duhaime défend à son programme?

Il y aura deux enjeux fondamentaux au lendemain de la crise. D’abord, le système de santé, qui devait sauver les Québécois quand arrive une pandémie, alors que ce sont les Québécois qui ont été obligés de sauver le système de santé. On savait que notre système était inefficace et la COVID l’a mis en lumière. C’est un système qu’il faudra réformer et permettre la contribution du secteur privé. Deuxièmement, la relance économique et la situation des finances publiques du Québec. On a le plus gros déficit de l’histoire du Québec. On est en train de créer la plus importante iniquité entre les générations. Pour la première fois, les jeunes québécois ont l’assurance de vivre plus pauvres que leurs parents. C’est une grande injustice. Nous proposerons un modèle de développement économique différent de celui des quatre autres partis.

Comment évaluez-vous la gestion de la crise sanitaire de la part de la CAQ?

J’aimerais qu’il y ait une commission d’enquête publique et indépendante, chose que refuse la CAQ. On est l’endroit du continent qui a le plus confiné ou à peu près. Malgré le fait que nous ayons eu le confinement le plus sévère, en constatant la colonne des décès, on est les pires au pays sur dix provinces. Si le confinement fonctionnait, ça ne paraît pas dans les statistiques.

Comment évaluez-vous la gestion de la crise sanitaire de la part du député de Chambly et ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge?

Je pense qu’il a été le maillon faible du gouvernement quand on voit ce qui s’est passé avec le dossier de la ventilation dans les écoles. En temps normal, ce ministre ne serait plus autour de la table du Conseil des ministres. Les autres partis ont aussi réclamé sa tête. François Legault a choisi de le garder, mais il faut se rendre compte que c’est un canard boiteux. Il n’a plus beaucoup de pouvoir réel, M. Roberge, et il est une étoile pâlissante. Les pires victimes des mesures sanitaires abusives sont les enfants. Ça ne se mesure pas tous les jours avec des colonnes. Ça se mesurera par le taux d’obésité chez les jeunes, par le décrochage scolaire, la détresse psychologique, la consommation de médicaments, etc.

Claire Samson, députée d’Iberville, a claqué la porte de la CAQ et s’est jointe au PCQ à titre de transfuge. Que représentera sa voix pour vous à l’Assemblée nationale dès septembre?

C’est important pour nous d’avoir une voix à l’Assemblée nationale, car ça nous permettra de faire des points de presse quotidiens à l’Assemblée, de parler aux médias, de faire des bilans, de poser des questions, de présenter des projets de loi, des motions, tout un travail législatif. Je suis d’autant plus content que la députée qu’on a est une femme qui a un MBA d’une université américaine, qui a été gestionnaire de haut niveau dans les communications et les domaines culturels. C’est une femme chevronnée qui a un gros bagage. Elle est ce que j’appelle une députée A.

Quand on nomme Éric Duhaime, les réactions sont parfois instantanément négatives. Est-ce qu’Éric Duhaime est étiqueté, stigmatisé?

C’est sûr que quand tu as des opinions claires et assez tranchées, ça plait à des gens et ça déplait à d’autres personnes. Je suis conscient que ça puisse polariser. Je sais aussi que, à l’extérieur de Québec, on me connait souvent pour des citations hors contexte et on a parlé de moi pour les mauvaises raisons. J’ai à me faire connaître mais, en politique, la pire des choses qui puisse arriver, c’est d’être ignoré et que les gens soient indifférents à toi.