Rivière Richelieu : 25 000 m3 d’eaux usées déversées aujourd’hui

Pour des travaux d’entretien, la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a déversé aujourd’hui des millions de litres d’eaux usées non traitées dans la rivière Richelieu. Il s’agit de la quatrième fois en trois ans.

Dans un communiqué, la municipalité indique qu’elle procèdera à l’arrêt complet du poste de pompage Champlain jusqu’à 18 h 30 ce soir, et qu’elle prévoit déverser, directement dans la rivière, pas moins de 25 millions de litres d’eaux usées. Ce déversement, entamé depuis 6 h 30 ce matin, aurait été autorisé par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec (MELCC).

Des millions de litres chaque année

« Ce déversement estimé à 25 000 mètres cubes s’effectue en accord avec les exigences du MELCC. Les travaux seront effectués en continu et des mesures d’atténuation sont prévues. Les industries, commerces et institutions utilisant de grandes quantités d’eau seront également mis à contribution pour diminuer leurs rejets d’eaux usées. »

Notons qu’il s’agit du poste de pompage le plus important, acheminant en moyenne 60 % des eaux usées du réseau d’assainissement vers la station d’épuration. On évaluerait à plus de 210 millions de litres la quantité d’eaux usées déversée sans traitement dans la rivière Richelieu sur une période de trois ans, dans le cadre de travaux planifiés. Ces déversements se déroulent en amont des prises d’eau de certaines municipalités, dont Chambly.

Alain Saladzius, ingénieur civil et président de la Fondation Rivières, nous confie en entrevue avoir suggéré à la Ville que l’arrêt du pompage se fasse la nuit afin de réellement limiter les rejets, mais cette idée aurait été rejetée. « On m’a répondu qu’il fallait le faire de jour, sans se justifier. J’ai demandé à la Ville pourquoi ces déversements étaient si fréquents, et la réponse que j’ai reçue ne m’a pas semblé satisfaisante. On les justifie par des travaux d’entretien préventif, mais le besoin de tels travaux pourrait être invoqué à tous les mois, et on n’en serait pas plus avancés. Nous avons présenté des demandes d’accès pour consulter l’évidence d’une telle approbation par le ministère, comprendre ce qui a justifié ce déversement et ce qui a été exigé pour qu’il soit jugé conforme, et nous attendons de voir. »

« Le ministère de l’Environnement connaît les problématiques à résoudre, mais le ministère des Affaires municipales donne de l’argent sans tenir compte des priorités. » – Alain Saladzius

Des infrastructures trop vieilles ?

Le Directeur des infrastructures et de la gestion des eaux de Saint-Jean-sur-Richelieu, M Benoît Fortin, explique que le poste de pompage ayant été rénové dans les années 1990, son installation ne permettrait pas d’éviter les déversements lors des travaux d’entretien. Mais depuis les années 90, de l’eau « a coulé sous les ponts ». Selon M. Saladzius, les municipalités attendent depuis longtemps de bénéficier de fonds du gouvernement pour effectuer les travaux de rénovation nécessaires à ce que des solutions alternatives puissent être envisagées. « Le problème, c’est que les décisions ne sont pas prises de façon cohérente. Le ministère de l’Environnement connaît les problématiques à résoudre, mais le ministère des Affaires municipales donne de l’argent sans tenir compte des priorités, et sans faire une analyse au niveau du bassin versant. Nous, nous en faisons des études afin d’identifier les priorités d’investissements au niveau du Richelieu. On identifie des pistes de solution, mais il nous faut une écoute. On a des approches moins coûteuses, on parle de construire des réseaux d’égout séparés. Il est possible de réduire à la source et de mettre des infrastructures vertes. Nous sommes en pourparlers avec la ministre fédérale de l’Infrastructure et des Collectivités, Catherine Mckenna, depuis décembre. »