L’environnement pourrait écoper

Un texte de Martine Veillette

La pandémie laissera certainement ses traces à tous les égards. Du côté de l’environnement, elle a eu des effets positifs, d’autres plus négatifs. Certains s’estomperont avec le temps alors que d’autres perdureront. Les investissements pourraient aussi ne plus être au rendez-vous pour l’environnement.

Concrètement, dans la région, les MRC et les municipalités ont remarqué une hausse de la quantité de déchets générés sur leur territoire. Elles n’ont cependant pu dire la cause exacte ni en quantifier l’augmentation.

Au ministère de l’Environnement, on souligne que la pandémie a changé les habitudes de consommation, notamment par l’utilisation de masques, de lingettes jetables et de contenants de liquide désinfectant ainsi que par la diminution de l’emploi de certains produits réutilisables comme les sacs, générant davantage de matières résiduelles.

Luc Baillargeon, du regroupement Éco-citoyens de Chambly, estime que le Québec a fait un bond en arrière en ce qui a trait à la réduction des objets à usage unique, alors que des commerçants ont cessé de prendre les contenants des clients et que les sacs réutilisables ont été interdits.

Charles Séguin, professeur au Département des sciences économiques, à ESG UQAM, croit de son côté que ces habitudes reviendront.

Le ministère de l’Environnement a cependant précisé que bien que l’accroissement des déchets se soit fait sentir du côté résidentiel, une baisse a été constatée du côté des entreprises. Il note aussi que d’avril à juin, l’élimination des matières résiduelles a diminué de 14 % au Québec comparativement à l’an dernier.

M. Séguin indique, lui aussi, que les ordures ménagères ont augmenté, mais que celles des commerces et des restaurants ont diminué. Cela pourrait devenir un enjeu pour certaines municipalités dont la tarification n’est pas la même pour la collecte résidentielle et commerciale. « Si le télétravail reste populaire, ça pourrait mettre de la pression sur le système de collecte. La plupart des gens travaillent à l’extérieur de leur lieu de résidence », croit-il.

Transport et GES

Le ministère des Transports du Québec a étudié le débit de circulation sur les ponts. La constatation suivante a été observée : il y a eu une baisse durant le confinement. Cependant, en septembre, le débit était revenu similaire à celui de mars, avant la pandémie. On note toutefois une baisse de 10 % de l’achalandage par rapport à 2019. De plus, le MTQ a constaté que l’heure de pointe matinale était moins intense mais qu’elle s’échelonnait sur une plus longue période de temps. Celle du soir est similaire au passé.

Pour l’instant, il n’est pas possible de connaître la baisse exacte de GES pour 2020, puisque les données ne seront transmises au MELCC qu’en juin 2021. Le Ministère note toutefois que la diminution de transport entre mars et mai a eu une incidence positive sur la qualité de l’air. Cependant, les concentrations des différents polluants sont depuis revenues aux niveaux généralement mesurés au Québec.

M. Séguin souligne que des estimations montrent que durant la première moitié de l’année, il y aurait eu une baisse de 12 % des GES. « C’est une baisse énorme. Mais on ne s’attend pas à ce que ça dure. Le télétravail ne restera pas dans la même proportion », dit-il.

Le gouvernement du Québec a annoncé la volonté de réduire, en 2030, l’émission de GES de 37,5 % comparativement à 2009. Un plan de 6,7 milliards $ sur cinq ans a été présenté le 16 novembre. « Il y a eu une baisse temporaire durant la pandémie. Mais il n’y a pas eu de changements significatifs qui permettraient d’atteindre une réduction de 20 % par rapport à 2009 cette année. On met le cap sur 2030 plus sérieusement », a affirmé le premier ministre François Legault lors de la conférence.

Autres retombées

La pandémie aura également d’autres retombées que la hausse des déchets et la baisse temporaire de GES. M. Séguin avance une inquiétude sur le développement urbain. « Avec le télétravail, ça ouvre les possibilités aux gens de rester plus loin de leur lieu de travail. Le marché immobilier est plus actif en banlieue éloignée. Pour l’environnement, on se questionne si des terres agricoles seront dézonnées », se demande-t-il.

De plus, le gouvernement a investi des dépenses considérables pour lutter contre la pandémie, générant un important déficit. « Lorsque le gouvernement devra resserrer les valves des dépenses, il y aura de l’austérité. La santé et l’éducation passeront en premier. Il sera plus difficile de justifier des dépenses en environnement », croit l’enseignant. Il estime que ce sera similaire pour les municipalités aussi.