Une histoire d’amour et de passion

Depuis maintenant 50 ans, la céramique est au cœur de la vie du couple formé par Denise Goyer et Alain Bonneau. Une exposition, en cours au musée du Haut-Richelieu, retrace leur parcours en présentant des pièces marquantes.

Le Journal a fait incursion dans leur maison-atelier, construite par M. Bonneau et son père dans les années 1970 sur l’Île Goyer, à Carignan. Toutes les créations partent de leur sous-sol… et de la tête de Mme Goyer.

C’est elle qui crée les esquisses de chacune des pièces. Elle s’inspire de ce qui l’entoure : sa famille, des voyages, la nature, une naissance, d’autres objets, etc. Parfois, il y a une série sur un thème. « Parfois, ça commence par ‘’ Denise, ça nous prendrait un pichet ‘’ et elle en dessine un », raconte M. Bonneau. Lorsque le dessin est complet, ils fabriquent un moule à partir duquel est conçue chacune des pièces.

Quand elle a commencé sa carrière, la céramique était tournée à la main. « Ça permet de connaître le matériel. Le tournage, tel que conçu dans mon esprit, c’était limitatif et toujours rond. J’essayais de le déformer, de couper, la base était toujours ronde », mentionne l’artisane. Elle s’est alors tournée vers un autre procédé de fabrication, le moulage. « Ça ouvrait plusieurs possibilités », indique-t-elle.

La caractéristique de leur œuvre est que, malgré la présence du moule, chaque pièce est créée à la main. Leur collection comporte principalement des items utiles pour la cuisine comme des assiettes, des tasses et des bols. Une seule pièce, une théière, a été fabriquée à grande échelle et donnée à forfait pour répondre à la demande américaine. De sa demeure, le couple produisait à petite échelle.

Carrière internationale

Le couple créateur a participé à plusieurs éditions de salons d’artisans, notamment à celui des métiers d’Arts à Montréal, mais également aux États-Unis. Ce dernier a ouvert les portes aux créateurs pour une carrière internationale. De leur maison, ils expédiaient des articles en céramique un peu partout dans le monde, dont aux États-Unis, en Chine, en Australie et en Europe.

« C’était une fierté d’exporter nos produits en Chine », affirme Mme Goyer. « On vendait nos théières aux Chinois. Faut le faire! », renchérit son conjoint.

Aujourd’hui, leur marché est principalement canadien. Ils ont réduit leur production. Autrefois, ils procédaient à une dizaine de cuissons par année; maintenant, ils en font deux ou trois.

« Quand tu es passionné, ce n’est pas un travail. » – Alain Bonneau

L’histoire des pièces

Chacune des créations de Mme Goyer possède une histoire. Les visiteurs du musée situé à Saint-Jean-sur-Richelieu pourront les découvrir jusqu’au 1er septembre à l’exposition « Les arts de la table selon Goyer Bonneau, 50 ans de création ».

On y retrouve notamment une des plus anciennes pièces créées par l’artiste à son premier atelier qui était situé à Saint-Bruno-de-Montarville : l’Encensoir. Cette œuvre fait référence à son enfance, où la religion était encore très présente. Après sa création, l’Encensoir a été vendu à des prêtres.

Parfois, le nom est évocateur de l’histoire derrière la création. Par exemple, « Les jumeaux », deux vases identiques, symbolisent leurs petits-fils, des jumeaux. Elle a aussi créé « La chaloupe à grand-maman » : un pichet d’eau identifie cette dernière et trois verres représentent chacun de ses petits-fils. Le tout est posé dans une chaloupe.

Mme Goyer a aussi créé des assiettes mangées, en référence à sa mère qui répétait de « manger toute son assiette ». Une partie de l’assiette est manquante pour illustrer qu’une bouchée y a été prise.

Certaines de ses créations ont aussi été primées, exposées dans des musées. Une autre fait même partie de la collection de Guy Laliberté, fondateur du Cirque du Soleil.

L’ensemble des œuvres du couple n’est pas exposé, puisqu’il compte trop de pièces. « On a développé de trois à cinq nouvelles pièces par année durant 50 ans. C’est beaucoup », affirme M. Bonneau.

Vivre de leur passion

Le couple reçoit une fois par année des étudiants dans ce domaine. « On veut leur faire comprendre qu’il est possible de gagner sa vie en faisant ce travail. D’ailleurs, quand tu es passionné, ce n’est pas un travail », affirme le Carignanois.