Parlez à mon agent

Quel rôle jouent l’artiste, l’agent qui le représente et le journaliste qui en parle dans ce triangle relationnel incontournable?

« Vérification faite, comme le spectacle du 11 mars à Chambly affiche déjà complet, ça ne fonctionnera malheureusement pas pour l’entrevue », est ce qu’a répondu Kevin Lalancette, attaché de presse chez Roy & Turner Communications, quand le Journal de Chambly a fait une demande d’entrevue auprès de Roxane Bruneau. Le journal a donc demandé si Mme Bruneau aurait accordé l’entrevue si des billets étaient encore disponibles pour son spectacle au Pôle culturel de Chambly. « Comme Roxane est extrêmement sollicitée en ce moment avec la reprise des spectacles […] nous tentons pour l’instant d’accepter dans un premier temps les entrevues dans les villes où il reste des billets à vendre », a conclu l’attaché de presse de Roy & Turner Communications. « Les journalistes ne sont pas là pour faire la promotion des artistes. Il y a parfois une incompréhension de la part des relationnistes de presse ou des artistes sur le travail des journalistes. Ils ne sont pas là pour plugger un album ou un livre lancé par un artiste. Ils ne sont pas à la solde des artistes », met à niveau Patrick White.

« Comme le spectacle du 11 mars à Chambly affiche déjà complet, ça ne fonctionnera malheureusement pas pour l’entrevue. » – Roy & Turner Communications

Patrick White est professeur de journalisme et responsable du programme du baccalauréat en journalisme à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il définit la relation entre l’artiste et les médias au Québec de « spéciale en raison d’un star système qui est très développé à cause du français et que le Québec est une société tissée serrée. Ce star système n’existe pas au Canada anglais », différencie le professeur.

Martin Lussier, professeur du Département de communication sociale et publique à l’UQAM, définit l’agent comme étant un intermédiaire important entre l’artiste et les différents acteurs de l’industrie musicale. « Il représente l’artiste et s’occupe du réseautage. Il est également conseiller et gestionnaire de budget. Il planifie aussi une stratégie pour le développement de la carrière à plus long terme de l’artiste pour que celle-ci soit le plus stable possible », dépeint-il. Il met l’accent sur les tâches connexes réalisées par l’agence, qui permettent de dégager l’artiste pour qu’il se voue à son art.

L’agent intervient dans les décisions que prend son artiste. « Un gérant ne peut pas prendre la décision, par contre; ce n’est pas son rôle », identifie M. Lussier. Selon lui, « en théorie, un agent est supposé aviser son artiste pour toutes les demandes d’entrevue. Est-ce qu’ils le font tous? Peut-être pas ». D’emblée, des artistes pourront avoir donné des orientations conférant un certain libre arbitre à l’agence. En général, un agent empoche entre 10 et 15 % du cachet de l’artiste. Alors que certains s’improvisent agent, d’autres se forment. Des formations hors cursus existent et sont offertes en ce sens, par exemple par l’Association québécoise des agents artistiques (AQAA) ou l’Association québécoise de l’industrie du disque (ADISQ).

Devoir du média envers l’artiste

Le média doit trouver le juste milieu entre éviter le côté promotionnel dans le reportage culturel et diffuser l’information pertinente sur les artistes. Il a également un devoir quand il dépose ses mots sur l’œuvre rendue publique d’un artiste. « Il doit bien informer le public. Il doit rectifier le plus rapidement possible s’il y a des erreurs dans les articles publiés. Il doit donner la parole aux artistes pour les aider à se développer et se faire connaître dans un écosystème qui est très difficile », boucle Patrick White.