Après avoir été agressé

Le Chamblyen Dominique Théberge sort son livre, Piégé – Dans les griffes d’un prédateur, le 29 mars prochain. Il y raconte un pan de son passé, lié aux agressions sexuelles dont il a été victime.

Le livre est un fait vécu. L’auteur y relate notamment son enfance « joyeuse » jusqu’à l’arrivée des premiers abus vécus. Ceux-ci se  déroulent au secondaire. À cette période de sa vie, Dominique Théberge se sent « différent ».

Dyslexique, dysorthographique et hyperactif, il vit des troubles d’apprentissage. « Ces handicaps que j’avais sont une faille que mon prédateur a vue », met en table M. Théberge.

Pierre Raymond-Perron est l’agresseur en question. Le Chamblyen était alors professeur, mais il n’a pas enseigné à Dominique Théberge. Les premiers abus s’installent alors que l’adolescent n’a que 14 ans. Ils dureront jusqu’à l’âge de 16 ans. Au fil des années, Dominique Théberge croise son agresseur à de multiples reprises dans Chambly. Ce n’est que plus tard, quand le fils de l’agresseur porte plainte, que M. Théberge lève à son tour le drapeau rouge et intègre le mouvement dénonciateur.

Quand la procureure demande à Dominique Théberge de trier chronologiquement l’histoire, l’idée d’un livre se profile. « Pour moi, c’était un gros chaos. Les dates et les événements s’entremêlaient », exprime-t-il. Il a donc dû investiguer son passé afin de le clarifier au présent. On lui suggère d’écrire une lettre de déclaration de victime. « Ça a commencé par une page, c’est devenu un chapitre, un second, puis c’est devenu un livre », se remémore l’homme, connu à Chambly à titre de copropriétaire du restaurant La Croisée des chemins. L’exercice de coucher ses mots sur papier devient un acte libérateur pour lui. « J’étais en déni. J’ai dû accepter que j’ai été agressé, accepter ma naïveté, me pardonner. Ça a été super-douloureux, mais salutaire », convient M. Théberge.

De cette démarche, Dominique Théberge en soutire une émancipation. « Je suis passé d’un conseiller financier qui faisait de l’argent et vivait dans son petit monde à je suis une victime vivant une tornade de trois ans. Et je finis dans le milieu communautaire. Maintenant, mon objectif n’est pas de combler mes besoins, mais d’améliorer le monde dans lequel on vit », remarque celui qui est désormais à la direction générale de l’organisme Jeunes adultes gai-e-s (JAG).

Lire son mal

Souhaite-t-on que son agresseur lise le mal qu’il a causé? « Oui, mais je suis pas mal certain qu’il va s’en foutre », entrevoit l’auteur du livre. Il revient sur le moment où les victimes ont fait leur déclaration de victime devant le coupable. « Il regardait dans les airs et semblait passer du bon temps », estime l’entrepreneur chamblyen.

Ressources pour les hommes

Pour obtenir du soutien à titre d’homme agressé sexuellement, Dominique Théberge a fréquenté le SHASE (Soutien aux hommes agressés sexuellement). Le SHASE est un organisme qui offre du soutien aux hommes victimes ou survivant d’agression, d’abus ou d’attouchements sexuels, dans la région de l’Estrie. Le temps de distance pour s’y rendre était plus élevé que le temps d’intervention qui lui était offert. Il mentionne aussi les ressources offertes à Montréal. « Tu sais, Montréal – Sherbrooke, et pas de ressources entre les deux. C’est quasiment inexistant. Il y a des lacunes et ça manque d’employés », reconnaît celui qui est aussi maintenant vice-président du conseil d’administration du SHASE.

Il soulève que c’est le service responsable de la Condition féminine qui donne le budget en lien aux agressions sexuelles vécues par des homme. « Je trouve que c’est bizarre. Il y a quelque chose qui n’est plus tant ‘’2023’’ de genrer un ministère qui s’occupe des agressions sexuelles ou qui gère les dossiers de la communauté LGBT », met-il en reflet.

Dominique Théberge rappelle aussi aux hommes de dénoncer. « On a l’impression que l’on ne voit que ça dans les médias et que l’on finit par en être dépassé. Une fois que l’on aura fini de nettoyer ce gros bobo collectif, on pourra se réparer tous ensemble », image-t-il.

L’agresseur

À la mi-juillet 2021, Pierre Raymond-Perron, alors âgé de 77 ans, avait plaidé coupable au palais de justice de Longueuil aux accusations de contacts sexuels et d’attentat à la pudeur. Le 26 août 2021, il avait été reconnu coupable d’agressions sexuelles sur au moins quatre mineurs, incluant son propre fils. L’ancien professeur de morale avait écopé d’une peine de 30 mois à purger en prison pour des contacts sexuels et attentat à la pudeur, méfaits commis entre 1974 et 2001 sur des mineurs, alors qu’il était en situation d’autorité vis-à-vis trois d’entre eux.

L’agresseur utilisait de la drogue comme appât pour attirer ses victimes dans sa maison, son bureau ou sa chambre noire de l’école.

Tout comme le livre de Dominique Théberge, Pierre Raymond-Perron sortira, de prison dans son cas, le 29 mars prochain.

Le lancement du livre Piégé – Dans les griffes d’un prédateur, aux Éditions de Mortagne, aura lieu le 2 avril prochain, au restaurant La Croisée des chemins de Chambly.