Les salles à manger auraient pu ne pas fermer

Le Dr Horacio Arruda a reconnu que la fermeture intégrale des salles à manger des restaurants en zone rouge était une décision politique plutôt qu’une recommandation de la santé publique.

« Je ne sais même pas quoi dire. Sérieusement, c’est du gros n’importe quoi. Je suis simplement parti à rire quand j’ai vu ça, pousse d’un long soupir Éric Bellemarre, copropriétaire du restaurant mathiassois Chez l’Artisan. Je ne me fie même plus à ce que le gouvernement dit. Je me suis ajusté, je roule mes affaires. Je me suis arrangé sans eux (le gouvernement). Déjà que nous n’aurions même pas dû fermer au départ. Je me suis débrouillé », complète l’homme exaspéré qui prévoit rouvrir en même temps que la période des terrasses.

« Ça fait déjà des semaines que nous disons que nous sommes les boucs émissaires, déplore François Meunier, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales chez Association Restauration Québec (ARC). Pourtant, nous avons fait la démonstration que l’on était en mesure d’accueillir la clientèle en toute sécurité et on savait que la santé publique n’avait pas de reproches à nous faire. On ressent énormément de frustration de voir que c’est une décision gouvernementale. On a été sacrifiés pour faire passer le message que la population devait cesser ses contacts sociaux. Nous n’avons plus à supporter la fermeture des salles à manger. »

Un plan de relance

Des soupers au restaurant entre membres d’une même bulle, c’est ce qu’avait suggéré au gouvernement M. Arruda, directeur national de la santé publique. C’est toutefois une autre direction qu’a prise le premier ministre François Legault en ordonnant de fermer toutes les salles des restaurateurs situés en zone rouge. Ce sont six mois de fermeture sur douze que devra assumer le gouvernement, en 2020.

« Maintenant, c’est aussi sa responsabilité, son obligation morale de nous accompagner dans une relance et une aide financière adéquate. » – François Meunier

« Le gouvernement doit arriver avec un plan de relance et de réouverture qui nous permettra d’exister encore quand la crise sera terminée. Le gouvernement affirme qu’il assume totalement sa décision. Correct, c’est sa prérogative. Maintenant, c’est aussi sa responsabilité, son obligation morale de nous accompagner dans une relance et une aide financière adéquate. Présentement, on nous empêche de gagner notre vie. Chaque jour qui passe, la détresse augmente. Ça prend un message d’espoir clair du gouvernement qu’il sera au rendez-vous et qu’il nous soutiendra dans les circonstances », réclame M. Meunier.

Une décision qui mène à la faillite

Ils ont été nombreux, les commerçants en 2020, à mettre la clé dans la porte. Du lot, les restaurants n’ont pas été épargnés.

« C’est très difficile d’avoir des données à ce moment-ci de la situation, notamment à cause des programmes. Certains se maintiennent en vie. On aura un véritable portrait dans les prochains mois. La deuxième vague aura causé énormément de ravages. Je suis inquiet. Si rien n’est fait, on peut s’attendre à des milliers de faillites au Québec dans la restauration », rapporte au journal François Meunier. Au mois de novembre, Éric Bellemarre, qui a développé différentes stratégies pour pallier le manque financier, a réussi à récupérer 70 % de son chiffre d’affaires de 2019.

« Je n’ai jamais vu la couleur des 75 % promis attribués aux frais fixes. Je n’ai reçu aucune compensation pour le moment en cette deuxième vague. Je ne me fie pas là-dessus. Ça ne va pas bien, mais j’essaie de m’en sortir. Je ne m’assoirai pas à attendre que l’argent entre. Je garde ma tête en dehors de l’eau, mais pour ceux qui sont sur le bord de fermer et qui entendent le gouvernement dire qu’il aurait pu les laisser ouverts, comment penses-tu qu’ils se sentent? »

Survivre malgré tout

Avec son assortiment de produits locaux, la boîte, appelée « Chambly en boîte : Édition temps des Fêtes », vise à encourager les commerçants, particulièrement les restaurants qui ont été dans l’obligation de fermer à cause de la seconde vague de la pandémie. Les boîtes servent également à aider l’organisme Aux sources du Bassin, qui recevra une partie des profits de la vente de chacune des boîtes.

Chez l’Artisan fait partie de ladite boîte. Les autres commerçants participants sont la Ferme Guyon, le Restaurant Tre Colori, Les épices de Marie-Michèle, FG Chocolatiers, MJ & Cie, Chez L’Artisan, Les Grillades du Fort, Délires & Délices, Les Thés Fuji, Le Garde-Manger de François, la Boucherie du Terroir, L’Entraide Plus, la Cochonne Rit et les D’œufs Copines.

Hier, le propriétaire du Joe Beef a utilisé les réseaux sociaux pour propulser le mouvement #ouvreznoscaves, encourageant ses homologues à vendre une bouteille de vin sans être accompagnée d’un plat. Le message s’est propagé comme une traînée de poudre, partagé quelques centaines de fois sur Facebook. Cédant sous la pression, François Legault a annoncé lors de la mêlée de presse d’aujourd’hui la prochaine « adoption d’un projet de loi permettant aux restaurants voulant livrer de la boisson, de pouvoir le faire. »