Quinze pesticides détectés dans le Richelieu

Dans les onze prélèvements réalisés dans le Richelieu en 2016, le ministère de l’Environnement a détecté quinze pesticides ou produits de dégradation de pesticides. C’est ce qui ressort du rapport Présence de pesticides dans l’eau au Québec; Portrait et tendances dans les zones de maïs et de soya, publié par le ministère en février.
L’atrazine et le s-métolachlore se trouvaient dans 100 % des échantillons. D’autres substances chimiques, comme l’imazéthapyr et le glyphosate, ont été décelées dans 30 % et dans 18,2 % des échantillons respectivement. Les insecticides thiaméthoxame et clothianidine ont été détectés successivement dans 50 et 20 %. Le document signale que seulement 10 % de tous les échantillons dépassent le CVAC (critère de vie aquatique chronique). Le rapport stipule aussi que ce sont ces insecticides, soit les néonicotinoïdes qui « causent ces dépassements ».

« Il y a sûrement un effet sur la faune aquatique : malformation ou des problèmes de reproduction chez les poissons. » – Alain Saladzius

Richelieu faisait partie, entre autres, des quinze rivières du Réseau-rivières qui ont été échantillonnées. Le document cite les rivières Yamaska et Richelieu, et mentionne que « l’ampleur de la contamination, soit le nombre de pesticides détectés et l’importance des concentrations, est proportionnelle aux superficies des grandes cultures de maïs-soya, dans leur bassin versant ».
« Il ne faut pas être trop alarmiste, dans le sens où il y a des usines de filtration qui sont équipées d’un système d’ozonation qui détruit les contaminants émergents, commente en entrevue Alain Saladzius, président de la Fondation Rivières. Il faut être prudent dans l’interprétation. C’est sûr, c’est problématique. Il y a sûrement un effet sur la faune aquatique : malformation ou des problèmes de reproduction chez les poissons. Pour les humains, il faut poursuivre les recherches. Reste-t-il dans l’eau potable de ces contaminants-là? À ma connaissance, c’est infime. »
Marcel Comiré, directeur du COVABAR, abonde dans le même sens en ce qui a trait aux CVAC. « Si les concentrations sont plus grandes, il y a un effet indésirable sur les espèces aquatiques. »
Le COVABAR a réalisé avec le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs une étude sur les mulettes (moules d’eau douce), qui sont classées au premier rang de priorité pour la conservation. « Une des causes est leur exposition à la pollution de la rivière, étant des organismes qui s’alimentent en filtrant l’eau. Pourtant, elles jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes d’eau douce. Entre autres, les mulettes servent de nourriture pour de nombreuses espèces aquatiques ou terrestres. »

Un débit plus grand

Selon les données du ministère, la rivière Richelieu possède un débit vingt fois plus important que celui de la Yamaska. « Pour des proportions en culture relativement similaires, le plus fort débit du Richelieu explique les fréquences de détection des pesticides plus faibles dans la rivière Richelieu que dans la Yamaska. »
Sauf que ces produits chimiques finissent par se retrouver dans le lac Saint-Pierre. « Il y a une dilution importante, mais elles persistent, observe M. Saladzius. C’est préférable de les éliminer autant que possible et d’amener des modifications des pratiques agricoles. » Le président ajoute qu’il s’agit d’« une question de précaution, vu qu’on n’en connaît pas les conséquences. » Il cite également tous les contaminants lors des débordements volontaires ou accidentels des usines de traitement.
Christian St-Jacques, président de l’UPA de la Montérégie, précise en entrevue qu’il n’est pas un spécialiste des pesticides. Il a insisté sur la mise en place de « plusieurs projets depuis une quinzaine d’années avec les bassins versants qui ont différents objectifs. En gros, il y a eu une amélioration des bandes riveraines élargies ainsi que des aménagements fauniques dans le but d’améliorer la biodiversité ».
M. St-Jacques a évoqué aussi le projet de la rivière Pot-au-Beurre, qui fait partie du grand bassin versant du lac Saint-Pierre. « C’est majeur. Il y a plus de 140 fermes dans le bassin versant, et au-delà de 80 % de ces fermes ont embarqué pour faire évoluer les pratiques agricoles : diminuer la quantité de pesticides. On en est dans la troisième année. »
Rappelons que l’UPA demande à Québec un plan de transition sur dix ans, soit une aide de 60 M$ chaque année. L’objectif est de réduire le recours aux pesticides.