Les monologues du vagin

La Chamblyenne Catherine Papineau présente Les monologues du vagin au Café-Théâtre de Chambly, du 17 mars au 15 avril prochains.

L’œuvre, mise en scène par Mme Papineau, devait fouler les planches en avril 2020. Freinée par la COVID-19, la pièce vivra enfin, trois ans plus tard. À l’approche de la première de dix représentations, à travers la hâte, s’installent la fébrilité et la nervosité. « Plus l’attente est grande, plus on s’attend à quelque chose de super hot. Ça met un petit peu plus de pression dans ce temps-là », concède la metteuse en scène. La popularité de la pièce ajoute aussi à la volonté de bien la livrer.

Dans ces trois années, avec les assouplissements gouvernementaux en alternance, la pièce a failli reprendre à quelques reprises. Catherine Papineau a dû recontacter ses comédiennes afin de recommencer les répétitions pour se dérouiller. Chaque fois, les efforts ont été vains devant la fermeture renouvelée des lieux culturels. Malgré tout, et en dépit du fait que des comédiennes ont quitté le navire en cours de route, remplacées par d’autres, Catherine Papineau n’a pas abandonné. « Chaque année, il y a eu une nouvelle comédienne. J’ai dû recommencer les répétitions avec une autre », met-elle en perspective.

Succès planétaire

Les spectateurs pourront savourer les écrits de l’autrice de ce succès planétaire, Eve Ensler. La dramaturge et féministe américaine s’était entretenue avec plus de 200 femmes avant d’écrire la pièce, qu’elle considère comme un recueil de témoignages. De monologue en monologue, chaque femme va ainsi, tour à tour, égrener une histoire intime qui est souvent drôle, parfois grave, voire atroce.

Une seule des comédiennes du projet original de 2020 est encore de la distribution actuelle. Les monologues du vagin à Chambly mettront en lumière les actrices Brynhilde Bord, Véronique Dupont, Sandrine Jutard et Gabrielle Labbé. Catherine Papineau fera aussi acte d’apparition sur scène. « Les filles sont nerveuses, mais elles ont tellement hâte! », reconnaît Mme Papineau.

Qui inviter?

La vente de billets va bon train. Toutefois, pour certains, le sujet en est encore un tabou. On n’invite pas n’importe qui à venir voir quand on récite des monologues dont le sujet est centré autour d’un organe génital. « Les filles se demandent qui elles vont inviter. Ce n’est pas une pièce à laquelle tu invites nécessairement tes collègues de travail. Elles inviteront peut-être plus des gens proches, qui les connaissent bien », fait valoir la metteuse en scène, qui a monté avec ses actrices une vingtaine de monologues.  

La femme et son organe génital

En 2023, où en est rendue la relation entre la femme et son organe génital? « Je pense que ce n’est pas encore pris d’emblée avec l’importance et l’aise que ça devrait. Il y a encore beaucoup de gens de mon entourage qui, quand je mentionne ça, sont gênés. On dirait que ça prend un verre dans le nez pour en parler un peu plus », définit Catherine Papineau. Celle qui a écrit la pièce Groupe Seins, parlant du cancer et qui propose différentes visions du sujet, compare « qu’il est plus facile de parler des seins que de parler de vagin ». Groupe Seins avait été présentée en 2018 au Café-Théâtre de Chambly.

Sujet sensible

Les sujets que met de l’avant Catherine Papineau à travers ses œuvres peuvent rendre inconfortable un certain public. Par exemple, les tabous entourant l’organe génital féminin existent encore. « Mon Dieu qu’il en reste, des tabous! », lance Catherine Papineau, qui n’a pas froid aux yeux. « Je dirais que faire une pièce de théâtre sur un viol ou une agression sexuelle, je trouverais ça difficile. Pas à cause des représailles possibles, mais bien parce que le sujet est lourd. Cela ne m’empêcherait pas de créer sur le sujet. »

Au fil des années, ce sont des sujets dont la femme est au cœur avec lesquels la Chamblyenne Catherine Papineau a tissé une partie de son œuvre théâtrale.

« Il y a des injustices entre ce que les femmes vivent comparativement aux hommes. Sur le plan des agressions sexuelles et de la violence conjugale, il y aura toujours plus de femmes victimes », exprime celle qui, à travers ses plus de 20 ans à titre de travailleuse sociale, a été sensibilisée à cet écart entre les genres.

Celle qui a été intervenante en violence conjugale souligne, malgré une évolution, le clivage, qui se situe tant au chapitre de l’implication familiale que sur le plan des salaires dans le milieu professionnel. Son regard sur la femme, elle l’a communiqué à travers ses œuvres. La pièce La Grenouille et le Chaudron, qui a fait une tournée dans plusieurs théâtres et organismes depuis 2015, est également inscrite au parcours de Mme Papineau. Cette fois, l’œuvre laissait la place à la violence conjugale en guise de thématique.

« J’aime les pièces qui permettent une réflexion, qui offrent une profondeur, qui aident à comprendre ou qui sensibilisent », énonce la metteuse en scène quant à la nature de sa ligne directrice artistique.

Sujet à venir

Ne faisant pas de discrimination sexuelle, l’Alzheimer frappe tous les genres. C’est un sujet qu’envisage la Chamblyenne. « Mon père a fait un accident vasculaire cérébral (AVC). J’aimerais faire une pièce de théâtre sur ce que vit une personne Alzheimer », boucle celle qui verra bientôt ses œuvres reprendre vie pour de bon sur les planches.