Les aléas du registre des armes à feu

Le 29 janvier 2019 était la date limite signifiée aux propriétaires pour qu’ils immatriculent leurs armes à feu.
Si l’on se fie à Salvador Aznar, président de l’Association chasse et pêche de la Vallée du Richelieu, ils seraient plusieurs, chez ses membres, à ne pas vouloir le faire. « J’ai énormément d’échos, affirme en entrevue M. Aznar. Certains disent qu’ils vont enregistrer, d’autres non. Si je regarde ce qui se passe un peu partout, la tendance : une grosse partie de notre effectif ne s’enregistrera probablement pas. »
La Loi sur l’immatriculation des armes à feu, en vigueur le 29 janvier 2018, stipule que « toute arme à feu sans restriction présente sur le territoire du Québec doit de ce fait être immatriculée. Cette catégorie d’armes, qu’on nomme aussi « armes d’épaule », regroupe généralement les carabines et les fusils de chasse ».
C’est auprès du Service d’immatriculation des armes à feu du Québec que les propriétaires d’armes à feu ont la responsabilité d’en demander l’immatriculation, et ce, même si elles étaient déjà enregistrées dans l’ancien registre canadien des armes à feu.

« Une immatriculation ne sauve absolument aucune vie. » – Salvador Aznar

Les chasseurs qui n’ont pas immatriculé leurs armes sont désormais susceptibles d’écoper d’amendes. Pour M. Aznar, dont l’association regroupe près de 900 membres et gère un champ de tir, « avant de faire des constats ici et là auprès de quelques centaines de milliers de chasseurs, ils (les autorités ) n’ont pas les ressources pour aller dans chaque maison ».

Pas d’abolition, mais des assouplissements

La ministre de la Sécurité publique Geneviève Guilbault a supprimé quelques « irritants » au registre québécois des armes à feu. Lors d’une conférence de presse tenue le 22 janvier, elle a insisté sur l’obligation de maintenir le registre.
Les assouplissements attendus une fois la loi modifiée n’obligent plus les propriétaires d’armes à informer le système s’ils partent chasser plus de quinze jours à l’extérieur de leur région. On abolira aussi le double numéro d’immatriculation et les propriétaires n’auront plus à fournir la longueur du canon de leur arme.
« Après le 29 janvier, nos policiers vont devoir appliquer le règlement et la loi, mais on ne va pas faire du porte-à-porte pour vérifier les gens, a affirmé le grand patron de la Sûreté du Québec, Martin Prud’homme, à l’Assemblée nationale. Notre intention, c’est d’encourager les gens (à enregistrer leurs armes). Ce n’est pas de les poursuivre. »

Villes et régions

Pourquoi les propriétaires tiennent-ils à ne pas immatriculer leurs armes? a demandé le Journal à M. Aznar. « On est la seule province au Canada où la population est obligée d’enregistrer. Est-ce qu’on est dans un pays égalitaire? Nous, les chasseurs, poursuit-il, nous savons parfaitement qu’une immatriculation ne sauve absolument aucune vie, en plus de (produire) la paperasse. »
M. Aznar soutient que c’est dans « les villes que les armes sont mal perçues, car c’est là où il y a les bandits, la mafia, les gangs de rue. Les gens de la région ne vivent pas cette situation-là. »
Robert Dominique, un résidant de Saint-Césaire, est un chasseur de longue date. Il est aussi moniteur de cours de chasse. « La réponse est oui, confirme M. Dominique, à qui le Journal a demandé s’il a enregistré ses armes. Étant moniteur avec les fédération de tir et de chasse, membre du conseil d’administration de plusieurs organismes de chasse et pêche, c’est un peu difficile pour moi de ne pas être en loi. Ce n’est pas pour des raisons de conviction; c’est par obligation. Si je veux continuer à vouloir siéger (à ces organismes) » Et d’ajouter : « pour être moniteur, ça prend une accréditation de la Sûreté de Québec ».
Au Québec, en ce moment, on estime que 349 952 armes sont enregistrées alors que 1,6 million d’armes sont en circulation.