L’ascension fulgurante du gin

Ils vivent une croissance exponentielle et ne sont pas un feu de paille. Les amateurs de gin sont là pour rester et partager leur fiévreuse passion éthylique.

« Depuis 2017, les gins ont le vent dans les voiles. Trois ans plus tard, l’ampleur continue d’augmenter. Il y a toujours de nouveaux clients, de nouveaux produits, particulièrement des produits du Québec », expose Ariane de Warren, directrice, marketing expérientiel à la SAQ.

Ce sont plus de 110 gins québécois qui sont offerts en ligne ou dans les succursales de l’institution gouvernementale, témoignant de la variété dudit produit. Depuis septembre 2019, devant des clients dont le palais se raffine et devient, par la force des choses, exigeant, la SAQ a instauré un système de pastilles de goût tout comme elle l’avait fait pour les vins. L’outil se veut simple et pratique afin de permettre un choix selon les préférences. Genièvre, herbacé/végétal, floral, forestier/boréal, agrumes, fruité, épicé et boisé/fumé sont les déclinaisons aromatiques identifiées sur les tablettes où se dépose le liquide vedette, véritable locomotive des spiritueux de la province.

« L’engouement est fulgurant et la croissance a été supérieure à nos attentes. Depuis le début de l’année, la croissance de ventes est de 42 % par rapport à l’an passé. Plus de 67 % des ventes totales de gins sont des gins québécois », chiffre Mme de Warren.

En ce sens, afin d’aiguiller rapidement le client soucieux d’acheter localement, les identifiants Origine Québec, Préparé au Québec et Embouteillé au Québec s’ajoutent désormais aux pastilles de goût. Depuis quelques années, au rythme de la demande, les producteurs de gin gagnent en volume et les joueurs sont de plus en plus nombreux sur le marché alors que l’on dénombre une cinquantaine de distillateurs dans la province.

Une passionnée à Rougemont

Les groupes de discussion se multiplient sur les réseaux sociaux. Les fervents y partagent leurs astuces, leurs concoctions maison et critiquent les différentes saveurs de gin. C’est le cas de Joanie Dionne, une Rougemontoise qui communique avec vibration son enthousiasme.

« J’ai développé cet intérêt lors de l’été 2019. Initialement, j’ai une passion pour les produits québécois. Il y a eu une éclosion avec cette gamme de produits. Tu rencontres d’autres gens qui en suggèrent. Tu ne peux qu’embarquer », exprime la femme, qui ajoute avoir nuancé et développé son palais à force d’essayer différentes variétés.

Il est difficile pour certains de définir une palette à laquelle s’identifier en ce qui a trait à ses préférences. « Je ne suis pas capable de te nommer qu’une seule pastille. J’en aime plusieurs. Je me rapproche des gins classiques, London Dry Gin, mais aromatisés. Là, tu viens me chercher. Si je ne devais choisir qu’une palette, ce serait genièvre », affirme-t-elle.

Quant au gin qu’elle choisirait si elle ne devait en boire qu’un seul pour le reste de ses jours, c’est avec déchirement qu’elle prononce du bout des lèvres « présentement, je dirais le Jules Ernest. »

Budget de gin

Pour avoir sondé à combien pouvaient s’élever les dépenses d’un amoureux de gin hebdomadairement, les réponses générales correspondent chez ceux qui osent se prononcer. Il n’est pas rare qu’un gineux (surnom employé dans cette communauté) qui se respecte ajoute une ou deux bouteilles à sa collection colorée. « Chez certaines personnes, un budget de gineux peut ressembler à un paiement mensuel de voiture », constate Mme Dionne.

Au même titre qu’un groupe de lecture se rassemble afin de parler du dernier livre lu ou que d’autres se rassemblent pour jouer au badminton, les groupes de gin créent également leurs événements et honorent cette boisson que d’autres peinent à boire.

« Ce sont des moments intéressants. Parfois sous forme de souper festif, ça devient l’occasion de faire des commandes communes de gins d’ailleurs et, en goûtant en groupe, on décèle des saveurs qu’il n’aurait peut-être pas été possible de détecter de façon solitaire. On se conseille également selon l’expérience vécue pour des achats futurs. Et, en général, ce sont des gens fort sympathiques, les gineux », prêche Joannie Dionne, la voix empreinte d’un sourire.

La femme conclut que « mon rêve secret est de contacter une cidrerie pour élaborer un gin ». À Rougemont, ce ne sont pas les candidats qui manquent.