La CMQ leur retire leurs cartes de crédit de la Ville

Le travail des fonctionnaires de la Commission municipale du Québec (CMQ) est quotidien depuis la mise en tutelle de la Ville de Chambly. Leur dernière décision, hier, a été de retirer les cartes de crédit de la Ville au maire, au directeur général et à la directrice générale adjointe de Chambly.

Le 19 mars, les élus du conseil municipal recevaient un courrier indiquant que « la Commission a fait annuler les trois cartes de crédit de la Ville », celles du maire, Denis Lavoie, du directeur général, Michel Larose, et de la directrice générale adjointe, Annie Nepton.
« Près de trois semaines après la mise en tutelle de la Ville de Chambly, la Commission a déjà fait certains constats inquiétants dans l’administration municipale. Même si notre analyse de la situation n’en est qu’à ses débuts, il nous semble important de vous faire part de l’utilisation inappropriée des cartes de crédit à la Ville et des mesures qui doivent être prises à cet égard », pouvait-on lire en introduction du courrier.
Les tuteurs, Denis Michaud et Martin St-Laurent, expliquent que les cartes de crédit de la Ville ont été utilisées pour « des dépenses personnelles, principalement des dépenses de repas, incluant bière, vin et alcool. Très souvent, ces trois personnes participent au même repas, payé avec une de ces cartes. »
Dans le courrier, on met en avant des dépenses pour un total de 734,82 $ de mars à novembre 2018.
Les tuteurs ont indiqué cependant qu’ils en étaient « aux premiers pas dans l’examen des comptes de carte de crédit de la Ville. Dès que le travail sera terminé, nous serons à même de vous présenter un tableau plus complet des dépenses engagées et d’envisager avec vous (les élus) les mesures qui devront être prises. »
Ils ont rappelé que la procédure à suivre lorsqu’un élu ou un fonctionnaire engage une dépense personnelle dans le cadre de ses fonctions, c’est d’assumer ces dépenses et ensuite d’en demander le remboursement. « L’utilisation d’une carte de crédit de la Ville ne peut servir à couvrir des frais personnels de repas ou de déplacement », précisent les tuteurs.
Une nuance est faite entre d’un côté Mme Nepton et M. Larose, et de l’autre, Denis Lavoie. Pour les tuteurs, « il ne fait aucun doute » que les directeurs ont utilisé leurs cartes de crédit de la Ville « pour payer des dépenses personnelles ».
Le maire pourrait, quant à lui, faire une dépense pour le compte de la Municipalité sans qu’une résolution ne soit votée pour cela. Mais pour ce faire, il doit présenter des pièces justificatives et non faire « le paiement direct en utilisant une carte de crédit de la Ville ». Cependant, la dépense du maire, faite dans des restaurants de Chambly et agrémentée d’alcool, n’a pas été jugée par les tuteurs comme une dépense pour le compte de la Municipalité.

« C’est de la procédurite fonctionnariale québécoise. C’est leur façon de voir. » – Denis Lavoie

Réaction du maire

« J’ai parlé aux tuteurs, hier. Ils ne disent pas que la dépense était injustifiée. Ils disent que chaque conseiller aurait dû faire une allocation de dépenses personnelles et se faire rembourser », a indiqué Denis Lavoie. Dans le courrier adressé aux élus, les tuteurs mentionnent qu’il s’agissait bien de dépenses personnelles en ce qui concerne la directrice générale adjointe et le directeur général.
Pour M. Lavoie, tout cela « c’est de la procédurite fonctionnariale québécoise. C’est leur façon de voir. Maintenant, les élus chamblyens ont eu toutes les allocations de dépenses, les cartes de crédit, et ils les voient chaque mois. Cela veut dire que des fonctionnaires viennent se placer par-dessus des élus du peuple. Ça, j’ai un problème. »
Le maire indique que les vérificateurs trouveront d’autres cas similaires. « C’est sûr! C’est de connaissance, dans la ville, qu’on travaillait le midi pour des dossiers de la Ville. Tout le monde le sait, et oui, on travaillait le midi! Chaque carte de crédit est arrivée au conseil chaque mois et il n’y a jamais eu de questions de l’opposition. Pourquoi on est la Ville la mieux gérée? Parce qu’on a mis du temps et beaucoup de temps dans nos dossiers. Si on est taxés parce qu’on a trop travaillé, je plaide coupable. »

Réaction de l’opposition

Alexandra Labbé indique en effet que depuis son élection en 2017, elle n’a jamais posé de questions sur les allocations de dépenses du maire et des fonctionnaires. « Les relevés de carte de crédit, ce n’est pas une résolution qui passe au vote. Je n’ai pas posé de questions, car cela ne semblait pas être de grosses dépenses, mais cela n’empêche pas que je me questionnais. On est tous d’accord pour dire que l’alcool aux réunions de travail, cela n’a pas sa place. Que la Ville paie pour une consommation par personne au party de Noël ou offre le vin aux commerçants lors d’un cocktail, c’est autre chose que des fonctionnaires ou le maire qui se paient des bouteilles de vin sur le dos des contribuables. C’est quelque chose qui m’avait choquée dès le début, mais on choisit ses batailles. »
Ce que Mme Labbé veut mettre de l’avant, c’est « surtout cette culture du tout-permis. Une carte de crédit, c’est pour la Ville. On a dans notre salaire une allocation de dépenses. Les dépenses personnelles dans le cadre de nos fonctions, c’est à nous de les faire. C’est ce tout-permis qu’il faut dénoncer. C’est aussi le silence de tous les conseillers. Moi, en voyant tout cela, je ne peux pas le défendre. Je ne vois pas comment les élus de la majorité peuvent encore le faire. »