Journée de la Francophonie : le Richelieu, un bastion

Depuis l’époque de la Nouvelle-France, la Vallée-du-Richelieu a constamment été un espace francophone en dépit de sa proximité avec les États-Unis.

La Francophonie est célébrée ce 20 mars. La Vallée-du-Richelieu est l’un de ses plus fidèles sanctuaires.

« Cela remonte évidemment aux premiers colons, souligne Réal Fortin, membre de la Société d’histoire de la Seigneurie de Chambly. Chambly et sa région étaient assez habités. Mais les Français hésitaient à aller plus loin à cause des attaques des Iroquois et des Anglais. »

Région difficile

Installés, les Français constituaient la base solide de la population mais restaient toutefois peu nombreux. « Cette région était difficilement accessible en raison des rapides qui bloquaient la navigation, assure Ludger Beauregard, directeur du Département de géographie de l’Université de Montréal, dans son étude Le peuplement du Richelieu. De plus, on y trouvait à cette époque de grandes étendues de terres inondables et de marais. À tout cela se sont ajoutés les aléas de la guerre. Bref, la vallée du Haut-Richelieu n’a commencé à être développée qu’après la défaite à la guerre de Sept ans. »

Pour autant, Réal fortin assure que le régime anglais qui a suivi n’a pas modifié la francophonie des lieux.

« Dans les années suivantes, vers 1760, la révolution américaine a éclaté. Des loyalistes ont donc quitté les États-Unis vers le Richelieu. Ils étaient entre 200 et 300 sur Saint-Jean et Chambly. Mais les Anglais ne voulaient pas des catholiques. Ils ont donc migré plus loin. » Une version confirmée par Ludger Beauregard. « Ce sont ces migrants qui sont à l’origine de villes en Montérégie comme Henryville ou Philipsburg. »

De leur côté, les francophones ont poursuivi leur influence dans la Vallée-du-Richelieu. « Les événements guerriers lors du conflit des patriotes se sont déroulés à 70-75 % dans ce secteur, précise Réal Fortin. Les protestants étaient anticatholiques. Mais grâce aux grandes familles, le français a perduré. Les familles de colons français étaient composées de dix enfants et plus. Cela faisait la différence par rapport au modèle anglais, qui comptait un ou deux enfants. »

Question de religion

Dans cette lutte d’influence, les colons français ont aussi obtenu de l’aide inattendue. « Le Royaume-Uni a ouvert les vannes de l’immigration pour peupler l’Estrie, poursuit Réal Fortin. Parmi ces nouvelles populations figuraient les Irlandais, eux aussi catholiques. Ainsi, il n’était pas rare de voir des couples mixtes franco-irlandais. Grâce à cela, le français a perduré. »

Établie, la colonisation francophone s’est poursuivie avec le temps le long du Richelieu, comme l’atteste Ludger Beauregard. « Généralement, les colons francophones venaient des anciennes seigneuries situées dans la plaine de Montréal ou dans le Bas-Richelieu et recherchaient de bonnes terres pour s’y établir, ainsi que leurs enfants. Ce type de peuplement s’est donc fait de proche en proche. »