Le fruit défendu par les moines de Rougemont

Rougemont L’abbaye cistercienne Notre-Dame de Nazareth a aménagé ses 35 hectares de vergers pour vivre uniquement de sa vente de pommes. Et cela, sous beaucoup de formes et selon certains principes.

Des vergers à perte de vue dominés par le mont Rougemont. Ici, pas de jeu ou autre distraction. L’abbaye cistercienne Notre-Dame de Nazareth propose uniquement ses pommes et ses poires le long de huit kilomètres de chemin. L’essentiel est ailleurs : « On veut garder cela familial, explique Frère Jacques. On veut rassembler les familles, que les gens éteignent les téléphones et se parlent. C’est fantastique de les voir se réunir un peu partout sur le terrain et partager un pique-nique ou un barbecue. L’important, pour nous, c’est le fait qu’ils partagent cette expérience tous ensemble. »

L’autre particularité du verger est la possibilité d’aller cueillir ses fruits en voiture. « L’autocueillette s’est faite naturellement. On est le plus grand verger ouvert à la pratiquer, poursuit Frère Jacques. Les gens arrivaient en voiture et avaient leurs chaudières dans le coffre. Alors plutôt que de descendre, cela allait plus vite de rouler jusqu’à destination. C’est devenu une habitude. » Une aubaine pour l’espace, qui peut accueillir jusqu’à 1 500 personnes par jour! Une nette différence avec l’épisode COVID. L’ecclésiastique se rappelle : « La capacité était réduite à 150 véhicules. La file d’attente était assez longue pour boucher le village. C’est vraiment dommage, car aucun contact physique n’était établi dans un terrain aussi vaste. »

L’expérience des moines de cette abbaye remonte à 1932. Ils ont repris ce verger quasiment à l’abandon pour en faire une affaire prospère au point de permettre à elle seule d’assurer un revenu suffisant pour les douze moines y résidant : « Deux frères s’en occupent à temps plein pendant que les autres s’y attèlent lorsqu’ils en ont le temps, explique Frère Jacques. On fait les produits nous-mêmes, ce qui permet de travailler l’année entière. De décembre à février, nous sommes plus libres et nous nous dédions aux sous-produits. On récolte la purée de pomme pour en faire des pâtes de fruits, du beurre de pomme ou encore de la gelée. »

Une sacrée expérience

La production est rodée et s’affiche dans le magasin : « Tout a brûlé lors d’un incendie en 2017, se rappelle l’ancien responsable du verger. Nous avons donc tout reconstruit, mais avec notre expérience en plus. Nous avons normalisé les bâtiments pour accueillir du public en nombre. Cette saison est d’ailleurs très bien partie, on sent que la pandémie est derrière nous. »

L’expérience, c’est aussi la maîtrise du domaine de la pomme. Même si Frère Jacques tient à souligner qu’il n’est pas pomiculteur : « Nous sommes des moines qui cultivons des pommes. C’est différent, car notre première préoccupation, c’est Dieu. D’ailleurs, je le retrouve dans cette activité. » Au point que les pommes sont tout de même une spécialité : « On retrouve toujours les quatre ou cinq variétés qui dominent le marché, car les circuits de distribution ne veulent pas en prendre d’autres. Certaines communautés consomment les pommes selon leur acidité et leur taux de sucre. Cela ne nous empêche pas d’en proposer de nouvelles chaque année. Cela nous permet de fidéliser le client, car on ne les retrouve nulle part ailleurs. » Il vous reste encore un mois pour les découvrir!