Deux hommes unissent leur destinée à Chambly

Guy et Bertrand étaient soulagés que le mariage entre conjoints de même sexe soit autorisé au Québec et au Canada. Ils ont donc pu se dire oui à l’hôtel de ville de Chambly, le 28 septembre dernier.

Bien que pour eux, il s’agissait d’une suite logique de leur relation des 27 dernières années, les deux hommes (qui préfèrent taire leur nom de famille et leur lieu de résidence pour conserver leur quiétude) ont fait le choix de se marier afin que le conjoint puisse être officiellement répondant de l’autre.

L’élément déclencheur de cette décision est qu’un de leurs amis, qui venait de se marier, a été victime d’un accident cérébrovasculaire et que son conjoint pouvait prendre des décisions pour lui. « La loi ne permet pas au conjoint de fait d’être reconnu pour les décisions. C’est la famille », explique Bertrand. « Ça nous a mis sur la piste et on s’est dit pourquoi pas? Ça ne change pas grand-chose au quotidien », renchérit Guy.

Ils ajoutent que s’ils avaient pu, le mariage se serait déroulé à l’église parce qu’ils sont tous deux catholiques. « Il est temps que l’Église se déniaise, affirme Guy. Le mariage, c’est une union légale, peu importe le sexe des conjoints. Le mariage devrait être considéré comme l’union de deux personnes qui s’aiment, qu’elles veulent des enfants ou non. »

Ils ont choisi de le faire à l’hôtel de ville de Chambly puisque des conseillers sont habilités à célébrer les mariages. C’est le conseiller municipal Jean Roy qui a procédé à leur union, qui s’est déroulée en toute intimité.

Second mariage

Pour Guy, 73 ans, il s’agit d’un second mariage. Il a déjà été marié à une femme qui est décédée en 1989.

« Adolescent, j’ai vécu une période de turbulence parce que j’étais gai, mais je ne voyais pas comment je pouvais évoluer. Ma femme était en amour avec moi. J’ai décidé de poursuivre mon avenir avec quelqu’un qui m’aimait et avec qui j’avais des affinités, et ainsi renier une partie de moi », explique-t-il. « En 73, c’était encore difficile de sortir du placard et de vivre ouvertement », renchérit son conjoint.

Guy poursuit en indiquant que lorsque sa femme est décédée, ça a remis sa vie en question. « Est-ce que je reviens à qui je suis ou si je poursuis avec une autre femme? Trois mois après son décès, ma décision était prise. Il n’était plus question de me renier encore. En 89, c’était mieux vu », relate-t-il.

« Le mariage, c’est une union légale, peu importe le sexe des conjoints. » – Guy

Lorsqu’il l’a annoncé à ses proches, la nouvelle n’a pas fait une onde de choc. « J’avais 37 ans, ma mère s’en doutait et le savait. Il n’y a pas eu de problèmes », indique Guy.

L’homosexualité de Bertrand, 65 ans, a aussi été bien acceptée de ses proches. Un de ses frères l’est aussi. De son côté, il n’a eu des relations qu’avec des hommes. « À 16-17 ans, j’essayais d’approcher des femmes, mais ça ne marchait pas », raconte-t-il.

Acceptation

Les deux hommes saluent l’ouverture de plus en plus grande de la société envers les couples gais ou lesbiennes. « L’homosexualité n’est pas un choix. On fait le choix de vivre sa vie avec ça. Ça a été prouvé, c’est une question de gènes », affirme Guy.

Il ajoute que les mariages entre conjoints de même sexe, autorisés depuis 2004 au Québec et 2005 au Canada, sont une « preuve de l’évolution de la société ». « C’est une marque d’égalité, comme les femmes avec les hommes. On a fait un pas pour l’égalité de tout le monde », soutient Bertrand.

Les deux hommes se réjouissent qu’au cours de tous leurs préparatifs de mariage, ils n’aient jamais été la cible de jugements. « J’ai été impressionné. On le voit dans les yeux si l’on dérange. Je ne l’ai jamais senti de personne. On s’est sentis accueillis comme si c’était normal », dit Guy.

Hausse de mariages d’homosexuels

Il y a une quinzaine d’années, le mariage entre conjoints de même sexe a été autorisé au Québec et au Canada. Depuis, plusieurs homosexuels ont uni légalement leur vie.

Selon les données de l’Institut de la statistique du Québec, de plus en plus de mariages entre deux hommes ou deux femmes sont répertoriés. Les chiffres débutent en 2004, année où il a été autorisé au Québec. Il y avait alors 245 mariages entre conjoints de même sexe qui ont été célébrés. En 2018, le nombre grimpe à 714 mariages.

En 2002, l’union civile, qui est reconnue uniquement au Québec, a été instaurée. Certains couples homosexuels s’étaient prévalus de ce droit. Ce nombre a diminué avec les années, passant de 156 en 2002 à 34 en 2018.

Le Canada est le quatrième pays à avoir légalisé ce type d’union. Cependant, du côté religieux, ce n’est toujours pas accepté. « On ne peut forcer un ministre du culte à unir deux personnes si c’est contre sa religion, car cela serait contraire à la liberté de religion », peut-on lire sur le site Éducaloi.

On précise aussi qu’un conjoint, qu’il soit marié, en union civile ou de fait, peut donner le consentement aux soins si la personne est incapable de le faire. Cependant, pour s’assurer qu’il soit le seul à répondre, on recommande de se munir d’un mandat de protection.

À Chambly

Le mariage de Guy et Bertrand n’était pas le premier entre conjoints de même sexe à être célébré à Chambly. À la Ville, on indique que le premier a eu lieu en 2016.

Quelques mariages civils ont eu lieu à la mairie au cours des dernières années. On en dénombre entre 5 et 12, selon les années, depuis 2015.

Pour pouvoir se marier à l’hôtel de ville, certaines procédures doivent être réalisées. Un document fourni par la Ville doit être rempli. Les époux doivent obtenir une attestation de célibat, qui est délivrée par le Directeur de l’état civil, afin de prouver qu’ils sont libres de toute union antérieure.

Les personnes rencontrent ensuite le célébrant afin de signer l’acte de publication, qui doit être affiché 20 jours avant le mariage. Pour se marier à l’hôtel de ville, les couples doivent débourser 374 $.