Des enseignants occupent le bureau de Jean-François Roberge

CHAMBLY. Dans le cadre d’une action surprise, à 9 h ce matin, sur l’avenue Bourgogne, une cinquantaine d’enseignants ont pris d’assaut le bureau de circonscription du ministre de l’Éducation Jean-François Roberge afin de s’opposer presque intégralement à la réforme issue du projet de loi 40 (PL 40).

Silencieuse et pacifique, cette action en est une parmi une série à venir au sein d’un plan établi. Avec des manifestants munis d’une banderole sur laquelle on pouvait lire “ Le projet de loi  no 40 : ça ne passera pas “, le message qu’a voulu passer la Fédération Autonome de l’Enseignement (FAE) était clair.

« On souhaite qu’il entende notre détermination, indique d’entrée de jeu Sylvain Mallette, président de la FAE. Tout ce qui gravite autour du monde de l’éducation en vient à la conclusion que c’est une mauvaise réforme. Ce n’est pas une question de reculer de la part du gouvernement, c’est d’entendre les acteurs du milieu et de prendre le temps de réfléchir, donc de retirer le projet de loi. Le gouvernement et le ministre jouent un jeu de structure, encore une fois, mais on ne parle pas de moyens, on ne parle pas de ressources, on ne parle pas d’espace dans lequel les profs doivent travailler. C’est le message que nous portons aujourd’hui », ajoute le président.

« L’objectif premier de ce projet de loi, c’est de permettre à François Legault d’accrocher le trophée dont il rêve depuis des années, soit d’avoir la peau des élus scolaires. » – Sylvain Mallette

Informé de la situation alors qu’il était en commission parlementaire pour le PL 40, Jean-François Roberge a semblé prendre le tout avec un grain de sel.

« Je trouve ça vraiment déplorable. C’est une vieille tactique qui, au fond, aura servi à bien peu de choses hors que ça aura privé les citoyens de services pendant quelques heures. Ce n’est pas parce qu’il y a une occupation ou une manifestation qu’il y a de l’écoute. La veille de l’occupation du bureau, j’avais une conversation personnelle directement avec M. Mallette. Je n’accorde pas plus d’importance à ce qu’il me dit ou ce qu’il me dira parce qu’il pose des gestes comme celui-là. Pour moi, c’est futile. »

Un rejet presque entier

Si la CAQ fait preuve d’enthousiasme devant son projet de loi composé de 312 articles, c’est un tout autre son de cloche qui résonne dans le camp de la FAE.

« En toute transparence, il n’y a qu’un seul article, au sein de ce projet de loi mammouth dans lequel il y a tant d’éléments, qui a trouvé grâce à nos yeux. C’est la volonté du ministre de régler la condition de la fratrie. Il y a beaucoup d’ambiguïté et de confusion actuellement entre les frères et sœurs pouvant fréquenter la même école. La proposition faite par le ministre règle cette question, car c’est le Far West présentement à ce chapitre dans les commissions scolaires. Je tiens à rappeler que beaucoup d’organisations intéressées par l’éducation ont porté le même jugement que nous. C’est un projet de loi qui est mal ficelé », estime M. Mallette.

« La FAE doit prendre, de connaissance, des amendements déposés depuis une semaine dans le but d’ajuster le PL 40. Elle doit tenir compte également de ce que les centrales syndicales ont dit mais aussi de ce que plein d’autres groupes ont dit. Le cœur du projet demeure, mais nous avons apporté des ajustements importants qui démontrent l’écoute », rétorque le ministre Roberge.

Chasse aux sorcières

La FAE n’endosse pas ce qu’elle considère comme étant les réels motifs de la réforme.

« L’objectif premier de ce projet de loi, c’est de permettre à François Legault d’accrocher le trophée dont il rêve depuis des années, soit d’avoir la peau des élus scolaires. C’est ce qui guide le projet. Ce n’est pas la volonté de reconnaître l’expertise des profs ou d’accorder plus de service aux élèves, particulièrement les plus vulnérables. L’épine dorsale de ce projet, c’est la mise à mort des élus scolaires. Cette mise à mort, le gouvernement veut la faire sur le dos des élèves et des profs. Il assouvit une vengeance personnelle qu’il nourrit depuis l’époque où il était lui-même ministre de l’Éducation et qu’il a eu maille à partir avec les élus scolaires. Nous n’adhérons pas à cette façon de nous utiliser et d’utiliser le réseau public à ces fins », complète l’homme, qui s’est exprimé, entre autres, au nom des enseignants présents.

En désaccord, Jean-François Roberge affirme que : « C’est sans fondement. Il y a eu une campagne électorale. Je rappelle à ceux qui souhaitent que nous retirions le PL 40 que nous avons toute la légitimité démocratique pour aller de l’avant et implanter notre programme électoral. Il n’y pas d’agenda caché. On a clairement dit où l’on allait. On ajuste pour faire le meilleur projet de loi possible. Pas question de reculer alors que nous avons le mandat d’avancer. »

Syndicat de Champlain et commissaires

Le Syndicat de Champlain, représentant 11 000 membres au sein des enseignants et du personnel de soutien, est un regroupement détaché de la FAE. Les deux entités sont entièrement indépendantes l’une de l’autre. Le président du syndicat, Éric Gingras, se prononce quant aux jours comptés des commissaires qu’apportera, entre autres, le PL 40.

« Nous considérons que les commissaires ont eu du temps pour justifier leur présence. Maintenant qu’ils sont tassés, ils se disent nécessaires mais à nous, ils ne l’ont pas montré. Des commissaires à la défense des services et des enfants et de leur personnel, je n’en ai pas vu beaucoup. Ne plus avoir de commissaires, est-ce une mauvaise nouvelle? Poser la question, c’est y répondre. »