Montérégie : une visibilité à définir pour le sport féminin
Divers acteurs de la scène sportive féminine locale s’expriment sur la place que prend le sport féminin parallèlement à l’annonce d’un bar sportif exclusivement dédié à cette sphère d’activités.
Un bar sportif exclusivement dédié au sport féminin pourrait voir le jour à Montréal en 2025. C’est le projet des entrepreneures Catherine D. Lapointe et Caroline Côté. Les deux femmes ont décidé de rendre hommage à la gymnaste olympienne Nadia Comaneci en nommant leur futur établissement « Le Nadia ».
« Pourquoi pas? Si l’ambiance est bonne, la nourriture aussi et qu’il y a une bonne variété de bières, count me in! », fait savoir avec enthousiasme Alexandre Beaudoin, impliqué dans le hockey féminin à titre de gouverneur des Remparts du Richelieu.
« Je serais all in! Je pense que c’est un beau projet. On serait rendus là », exprime vigoureusement la plongeuse de haut vol Lysanne Richard.
« S’il y avait une taverne ou quoi que ce soit qui présentait du sport féminin, c’est certain que j’y serais », répond la boxeuse professionnelle Martine Vallières-Bisson, entraîneuse au Crew Gym de Chambly.
« Oui, certainement que j’irais. Cela serait une belle façon de faire de la promotion, de la visibilité et une bonne façon d’encourager les sports féminins », convient la Chamblyenne Marie-Ève Couture, arbitre dans la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF)
Suivre les filles
Martine Vallières-Bisson affectionne particulièrement la boxeuse Amanda Serrano. « Elle est une femme dédiée à son sport, une vraie guerrière! J’aime qu’elle soit accessible, impliquée dans la communauté, authentique, et surtout qu’elle veuille que les femmes puissent faire des rounds de trois minutes, comme les hommes, en boxe professionnelle », dit-elle. Elle soutient que Serrano a même délaissé sa ceinture de championne du monde WBC, car la compétition refusait d’accepter un combat féminin avec des rounds de trois minutes. « Cette athlète travaille au-delà de ses performances sportives. Elle le fait aussi pour les femmes et la future génération de boxeuses », résume-t-elle.
Alexandre Beaudoin déclare être un très grand fan de tennis féminin et de la Women’s National Basketball Association (WNBA). « En raison de mon âge, j’admire énormément les sœurs Williams, qui ont changé le visage de leur sport. Aujourd’hui, je suis les prouesses de Caitlin Clark, qui, malgré un talent hors normes, a pris la décision de jouer avec les filles lorsqu’elle était d’âge high school », encense-t-il. Il assiste à deux ou trois parties par saison de la Victoire de Montréal, dans la LPHF. « Comprenez-moi bien, je suis très heureux des succès de Marie-Philip Poulin, mais avant l’arrivée de la LPHF l’an dernier, on ne voyait les filles jouer qu’un tournoi par année », nuance-t-il.
Bien qu’elle reconnaisse la notoriété de la hockeyeuse Marie-Philip Poulin, Lysanne Richard affirme ne pas avoir de modèle féminin sportif en particulier. « Je trouve ça beau, de voir les filles travailler en équipe; la dynamique derrière cette force », estime-t-elle.
Marie-Ève Couture avance que le sport qu’elle préfère regarder à la télévision est le hockey féminin. Elle chouchoute également le tennis féminin. « Les Jeux olympiques sont intéressants aussi, car il y a plusieurs sports et athlètes qu’on n’a pas souvent la chance de voir. Je dirais que la gymnaste américaine Simone Biles serait certainement l’un de mes choix, tant par son talent et ses exploits que par son histoire de vie inspirante. Elle a vécu beaucoup d’adversité et elle a démontré une force de caractère incroyable », rapporte-t-elle au journal en guise d’athlète qui suscite son intérêt.
Des diffuseurs silencieux
Au Québec, le Réseau des sports (RDS) et TVA Sports sont des joueurs majeurs en matière de diffusion d’événements sportifs. Le journal a souhaité savoir quel pourcentage prend la diffusion du sport féminin dans leur grille horaire respective et si la demande était à la hausse de la part de l’auditoire. Nous avons également souhaité savoir si les commanditaires étaient moins nombreux à vouloir annoncer leurs produits à travers une diffusion de compétition féminine et s’il en coûtait moins cher d’annoncer pendant la diffusion d’une compétition féminine. Enfin, nous avons voulu comparer les cotes d’écoute d’une diffusion sportive masculine par rapport à une compétition sportive féminine de même nature. Patrick Tremblay, chef des communications et relations publiques à Bell Media, propriétaire de RDS, a mentionné « préférer décliner » l’offre de répondre aux questions. Quant à lui, le Groupe TVA n’a pas répondu aux messages du journal.
« Tranquillement pas vite, ça s’améliore. RDS diffusera la Victoire, alors que TVA Sports donne une très grande place au tennis féminin lors des Internationaux du Canada. Il y a aussi une belle couverture sur la nouvelle équipe de soccer professionnelle féminine. Donc, on avance », considère Alexandre Beaudoin.
« Je trouve qu’il y a quand même une ouverture de plus en plus à représenter le sport féminin de la part des chaînes de sports. C’est sûr qu’il y a du chemin à faire, mais je pense qu’il y a beaucoup de personnes bien intentionnées pour le tracer », observe Lysanne Richard. Elle estime que la venue du changement apporte sa part de réticences, et des diffuseurs, et des consommateurs. « On entre dans une belle période. Ça en parle beaucoup et les choses bougent et changent. »
Martine Vallières-Bisson est plus catégorique. « Je trouve ça aberrant! La visibilité du sport féminin est minime versus le sport masculin. Ça devrait être mis de l’avant davantage », réclame-t-elle. Elle apprend au journal l’existence de la chaîne All Women’s Sports Network (AWSN). AWSN est un réseau mondial de télévision sportive dédié exclusivement aux sports féminins. Offert dans 65 pays, il touche plus de 2 milliards de personnes. L’actrice Whoopi Goldberg et la société de médias Jungo TV l’ont lancé le 13 novembre dernier, aux États-Unis.
« Je crois que le sport féminin est en pleine croissance et qu’on va en voir de plus en plus à la télévision dans les prochaines années, ce qui serait une excellente nouvelle », termine Marie-Ève Couture.