Pour faire la différence pour les femmes violentées
Geneviève Caumartin souhaite faire la différence dans la vie de femmes violentées et les aider à quitter un foyer toxique. Pour ce faire, elle ouvrira une filière de Shelter Movers, soit Transit Secours, au Québec.
Cette résidante de Chambly s’est inspirée d’un événement tragique qu’elle a vécu pour se lancer dans cette aventure. Sa mère, Francine Bissonnette, a été assassinée en juin 2016 par son conjoint de l’époque. Ce dernier a été reconnu coupable.
« Je me suis demandé ce que j’aurais pu faire pour ne pas que ça arrive. Il y a beaucoup d’insécurité au niveau financier et la crainte de se retrouver dans la rue et de tout perdre. J’ai discuté avec les enquêteurs pour savoir ce que j’aurais pu faire pour l’aider. Ma mère avait 62 ans et n’avait pas beaucoup d’argent. Partir et tout perdre était inconcevable pour elle », souligne Mme Caumartin.
Elle souhaitait donc mettre sur pied un service pour aider ces femmes à déménager. La lecture d’un article qui parlait du mouvement l’a encouragée à poursuivre son idée. « C’était exactement ce à quoi je pensais », soutient la femme, qui œuvre dans le domaine informatique. Elle a communiqué avec un représentant de Shelter Movers pour pouvoir l’offrir au Québec.
Le service consiste à effectuer le déménagement et l’entreposage des meubles d’une femme qui souhaite quitter son domicile. Ces personnes seront dirigées par exemple par une maison d’hébergement. « On va communiquer ensuite avec la dame pour discuter et planifier avec elle le déménagement et s’assurer que tout est sécuritaire », indique Mme Caumartin.
Elle ajoute que pour ce faire, de deux à cinq bénévoles sont nécessaires, un agent de sécurité sera sur place au moment du déménagement et, au besoin, un policier.
Comme les maisons d’hébergement ne peuvent permettre aux femmes d’apporter leurs meubles, ceux-ci seront entreposés dans un endroit prévu à ces fins, le temps de l’hébergement.
Financement
La Chamblyenne a lancé le 10 mai, jour de la fête des Mères, la campagne de financement afin de pouvoir offrir le service cette année. « La fête des Mères, c’est une date symbolique pour moi », avance-t-elle.
Le service pourra s’amorcer lorsque le financement sera suffisant. Elle estime que ça prendrait entre 15 000 $ et 30 000 $ afin de le démarrer. Pour fonctionner une année, le financement doit être de 70 000 $. Les gens intéressés à donner peuvent le faire via la page Facebook Transit Secours ou le site Web de Shelter Movers.
Mme Caumartin vise la fin de l’été pour le mettre sur pied et offrir un premier déménagement. « Je cherche du financement rapidement, c’est important de le mettre sur pied. Le défi est supplémentaire en ce moment, puisque ce n’est pas évident de demander du financement », dit-elle. Des bénévoles sont aussi recherchés pour effectuer le déménagement, mais aussi pour prendre les appels et coordonner les opérations.
« On doit être capable d’aider des femmes à partir. » – Geneviève Caumartin
Maison d’hébergement
Mme Caumartin s’est aussi affiliée à la maison d’hébergement Simonne-Monet-Chartrand, située à Chambly, dans le démarchage de son service.
Hélène Langevin, directrice générale de la maison d’hébergement, soutient appuyer « sans réserve ce projet indispensable aux femmes vivant dans une relation toxique. Il est très malheureux de savoir que des femmes n’osent pas quitter un conjoint violent de peur de perdre toutes leurs possessions et de devoir recommencer à zéro au moment de se relocaliser, mais c’est une dure réalité ».
Elle précise que les biens laissés derrière par la femme sont un moyen pour le conjoint de conserver un contrôle. « Les femmes violentées sont à risque élevé d’homicide si elles ne quittent pas lorsqu’elles sentent que le moment est venu », souligne Mme Langevin.
« Il n’y a personne de mieux placée et de plus convaincue que Mme Caumartin pour chapeauter et faire valoir la pertinence de ce projet », conclut-elle.
Communication
Mme Caumartin a perdu sa mère, d’un conjoint violent. Ils étaient ensemble depuis un peu plus de quatre ans. Elle avoue avoir constaté que la relation n’était pas saine. « C’était difficile pour ma mère de penser à le quitter. Je lui avais parlé la veille de l’événement et là, elle semblait prête à le faire. On projetait d’acheter une maison ensemble », raconte-t-elle.
En cette période de confinement, la situation est accentuée. « Ça doit être terrible, croit-elle. En cette période, on doit être capable d’aider des femmes à partir. »
Elle conseille de toujours garder contact avec la personne qui est victime de violence. « Il faut toujours lui montrer qu’on est présent, à l’écoute et qu’on ne juge pas même si c’est difficile. Quand on est à l’extérieur puis qu’on voit quelqu’un qu’on aime dans cette situation, on devient frustré. On veut aider, mais on se sent impuissant. Elles n’ont pas toujours la force de partir. Il faut rester dans son entourage pour lui montrer qu’il y aura une personne si elle prend la décision de partir », affirme Mme Caumartin.
Elle poursuit en soutenant que, souvent, le conjoint déploie beaucoup d’efforts pour isoler la femme. « Il ne faut pas qu’il réussisse », conclut-elle.