Hausse des loyers en RPA

Alors que les résidences privées pour aînés (RPA) clament une hausse nécessaire des loyers pour couvrir leurs pertes, la Fédération de l’âge d’or du Québec (FADOQ) s’y oppose avec résistance.

Le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA) et le Groupe Maurice sont « en mode séduction ». Depuis quelque temps, les téléspectateurs peuvent voir les comédiennes Hélène Bourgeois-Leclerc, en processus de parfait vieillissement accéléré, et Carmen Sylvestre, en grand-mère attendrissante, dans des publicités qui attirent notre attention. Elles s’inscrivent dans le cadre des campagnes des Fêtes respectives du RQRA et du Groupe Maurice, qui espèrent obtenir de la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, une grille de loyers générique publiée par la Régie du logement.

Une pétition

Dans une pétition de la FADOQ, signée par des résidents en RPA de Chambly, on s’oppose à ce projet, avançant que cette grille permettrait aux Résidences privées pour aînés (RPA) de hausser les loyers de leurs locataires tout en limitant les recours possibles de contestation. Selon la FADOQ, le projet de loi 49 présenté par la ministre Laforest devrait être révisé pour « qu’il soit possible pour toute entité légale d’exercer des recours auprès de la Régie du logement au nom des locataires de RPA » et « qu’une représentation collective auprès de la Régie du logement soit possible ».

Dans une lettre ouverte publiée par Le Nouvelliste, le président-directeur général du RQRA, Yves Desjardins, affirme qu’un bail générique viserait à « assurer la pérennité des RPA du Québec, et ainsi éviter un transfert massif d’aînés dans le réseau public, qui en a déjà plein les bras ». Selon lui, il faudrait « permettre aux RPA d’ajuster les loyers selon les coûts réels des services et des soins qu’elles offrent, tout en préservant la capacité de payer des aînés qui y résident (…) » Dans cette affaire, le RQRA fait valoir que les dépenses des RPA augmentent deux fois plus vite que leurs revenus et que cela serait dû, notamment, à la pression qu’elles subissent quant à la hausse des salaires de leurs préposés, accentuée par la pandémie. Le secteur public, lui, s’appuie sur les impôts et les taxes des contribuables.

« (…) la majorité des aînés qui sont locataires ne peuvent démêler tout ça, avoir accès aux règlements ou signer la pétition. Ils sont à la merci de leurs résidences en ce sens. » – Jean

Une non-conformité

L’un des signataires de la pétition de la FADOQ, à qui l’on donnera le prénom fictif Jean puisqu’il a souhaité garder l’anonymat, est un usager de la Résidence La Seigneurie à Chambly, du groupe des Résidences Fleur de Lys. Le journal a inspecté son contrat de renouvellement de bail, dont le loyer a été augmenté de 40 $ cette année. Jean paiera ainsi 1845 $ par mois, au lieu de 1815 $, pour continuer de vivre dans son logement 4 ½.

Sur le contrat, seuls deux choix lui sont proposés : celui d’accepter la hausse du loyer et de renouveler son bail, et celui de la refuser et de quitter le logement. Or, cette offre ne se conforme pas aux prescriptions de la Régie du logement et du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, qui prévoient que les résidences existant depuis plus de cinq ans doivent aussi proposer le choix de refuser la hausse tout en conservant le droit de demeurer dans son logement.
« C’est ce que l’on appelle le ‘’maintien dans les lieux’’ », peut-on lire dans un document officiel produit par les deux instances. Au sens de Jean, cette omission serait une « pratique courante et répandue » en milieu RPA afin de conditionner les résidents à se résigner à accepter les nouveaux frais de loyer.
« Moi, je me débrouille avec mon ordinateur, je suis autonome. Mais la majorité des aînés qui sont locataires ne peuvent démêler tout ça, avoir accès aux règlements ou signer la pétition. Ils sont à la merci de leurs résidences en ce sens. »

Éric Beaulieu, vice-président des opérations au groupe Résidences Fleur de Lys, affirme que le « modèle a été fait de bonne foi et qu’il n’avait pas été révisé depuis cinq ans (…) la problématique de la clause ne s’est jamais présentée à nous auparavant ». Il promet que les Résidences Fleur de Lys corrigeront le tir dans les prochains avis de renouvellement. « Notre modèle de réponse inclura ‘’Je refuse les modifications proposées et je renouvelle mon bail’’. » Il précise que tous les loyers incluent chauffage, eau chaude, câble de base, que la hausse du loyer a été calculée par un comptable et que « les résidents ont le choix de la contester ou de la refuser, mais peu l’ont fait ».

Jean craint que la demande du RQRA soit traitée favorablement par la ministre Laforest. « Seul Richard Longtin, l’attaché politique de Jean-François Roberge, député de Chambly, m’a répondu en me disant de rester patient. Mais le temps manque. Si un projet de loi passe, il sera trop tard pour retourner en arrière. Marguerite Blais est une grande déception pour moi. Même si le loyer des RPA relève du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, il s’agit aussi des droits des aînés, qui devraient être traités avec autant de respect que tous les locataires. »

Une source proche de la ministre Blais a indiqué qu’elle travaillait sur une réforme du bail et de l’annexe pour les résidences privées pour aînés. Du côté du cabinet de la ministre Laforest, on a confié être sensible à la situation que peuvent vivre certaines personnes aînées. « D’ailleurs, nous travaillons avec le Ministère de la Santé et des Services sociaux, afin de proposer un nouveau modèle de bail pour les RPA. De plus, il convient de rappeler que si les locataires dans les RPA ne sont pas en accord avec la hausse de loyer qui leur est soumis, ils sont en droit de la refuser. Le cas échéant, c’est alors au propriétaire de justifier sa demande et de faire les démarches auprès du Tribunal administratif du logement. Toutefois, pour aider les personnes aînées résidant dans les RPA à connaître leurs droits et à les faire respecter, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Mme Andrée Laforest, a rapidement octroyé 3,2 M$ a la Fédération des Centres d’assistance et d’accompagnement aux plaintes (FCAAP), afin de l’aider dans sa mission. La FCAAP est donc encore mieux outillée pour informer sa clientèle cible et l’accompagner lorsque nécessaire. »