Chambly : une socialisation en solitaire pour des adolescents

La série Adolescence met notamment en lumière la présence accrue des réseaux sociaux dans la vie de cette tranche d’âge. Le journal est allé à la rencontre de trois familles et de leurs adolescents afin de valider l’ampleur de cette réalité.

Que ce soit à travers TikTok, Snapchat, Facebook ou Instagram, Rosaline, 12 ans, Zachary, 14 ans, Enrik, 14 ans, et Chloé, 16 ans, sont sur les réseaux sociaux. « Je suis pas mal tout le temps là-dessus », admet Enrik. Zachary est allé voir sa moyenne de temps alloué et la chiffre entre cinq et six heures par jour. « Quand tu t’ennuies, ça passe le temps », dit-il. « C’est pour parler à nos amis », renchérit Rosaline. Selon le réseau social, Chloé utilise les plateformes pour différentes raisons.

Il peut s’avérer difficile de défaire l’emprise. « Les réseaux sociaux, c’est très addictif. Les parents les acceptent » de plus en plus jeune « . Une fois qu’on devient plus vieux, ça devient compliqué de faire autre chose », constate Zachary. Chloé confie y passer beaucoup de temps, mais elle s’impose une limite afin de se consacrer à d’autres occupations. 

Communiquer avec ses amis

« Je communique avec eux (amis) pas mal juste sur ça », confirme Enrik. « Maintenant, les gens se parlent quasiment plus sur les réseaux que dans la vraie vie. On est trop habitués à aller là-dessus plutôt que de se voir après l’école », exprime Zachary.

« Ça prend quand même beaucoup de place dans ma vie au niveau social, plus que de juste passer du temps à regarder des vidéos », indique de son côté Chloé. 

Cynthia Marier, mère de Rosaline et Zachary, dépeint que les enfants passent parfois la fin de semaine seuls à la maison, connectés à leurs amis. « Ils n’ont plus de vie. Tu demandes pourquoi elle ne va pas jouer avec son amie et elle répond qu’elle est avec son amie. Mais elle est avec virtuellement. Leur vie sociale en prend un méchant coup », considère la mère de famille.

« Les réseaux sociaux, c’est très addictif. » – Zachary

Montrer l’exemple

« On n’est pas un super exemple. Le soir, après le travail, tout le monde relaxe de son côté. Moi-même sur le cellulaire », observe Claudine Ayotte, mère d’Enrik. Elle remarque la « place nuisible » que peut occuper le cellulaire. « Il aurait fallu que l’on mette des limites claires en partant. On n’a pas été constants », avoue-t-elle avec lucidité.

« Je ne suis pas un très bon parent de ce côté-là. On est nous-mêmes beaucoup sur les réseaux sociaux. Quand on est au bout du rouleau et que l’on répète sans cesse jusqu’à en pogner les nerfs, on finit par couper le réseau carrément », mentionne de son côté Cynthia Marier. Les téléphones peuvent être confisqués à l’occasion.

Accès en tout temps

Line Durocher, mère de Chloé, soulève que les réseaux sociaux ont fait leur entrée avec plus d’insistance lors de la pandémie, en grande période d’isolement commune. Depuis, le comportement s’est enraciné, si bien qu’il est pratiquement impossible de suivre tout ce que fait son adolescent avec son cellulaire. « Ils savent qu’il faut que l’on ait accès en tout temps à leur cell. On a tous les codes. Si l’on a des doutes, ils nous donnent le téléphone sans s’obstiner et on a le droit de fouiller dedans », soutient Cynthia Marier.

À l’affût, Claudine Ayotte a entendu une discussion impliquant sa fille de dix ans et l’une de ses amies, présente sous son toit, dans laquelle il était question de dévoiler des parties du corps. « J’ai dû intervenir. C’est dangereux, on ne sait pas qui se trouve de l’autre côté. »

Les adolescents rencontrés disent ne pas avoir été témoins « vraiment » de débordements sur les réseaux sociaux. Certains avouent toutefois être conscients que l’intimidation existe sur les diverses plateformes. « Des fois, tu regardes une vidéo sur Instagram et, dans les commentaires, c’est plein de haters », remarque Zachary.

Couper les réseaux sociaux

Le journal a demandé aux jeunes comment ils réagiraient si on leur coupait les réseaux sociaux. « Au départ, ça me ferait chier un peu, mais je trouverais un moyen de contacter mes amis autrement », répond Enrik. « Je m’ennuierais pendant une journée. Ça couperait le monde social », estime Zachary. « Je ne suis pas une adolescente vraiment attachée aux réseaux sociaux. J’aime des fois faire d’autres activités », relate Chloé. Chez elle, il n’est pas question de téléphone à table.

« Nous, on a eu les belles années. Eux, c’est plate », conclut Cynthia Marier. « Ils n’ont pas connu la même enfance que nous », reconnaît aussi Claudine Ayotte. Le constat d’une nostalgie du temps où il fallait aller frapper à la porte de son ami pour le rencontrer s’installe.