« Il » s’en va

Le légendaire Patrick Norman se produira en spectacle le 28 mai prochain au Pôle culturel de Chambly. Le journal s’est entretenu avec le musicien.

Plus de 50 ans de carrière et 33 disques enregistrés font partie de la mathématique musicale qu’a additionnée Patrick Norman. C’est une tournée d’adieu qu’il a entamée avant que ne tombe le rideau sur une carrière plus que bien remplie.

Vous avez enregistré plusieurs de vos disques à l’extérieur du Québec (Nashville, Louisiane, etc.). Quel effet sonore cela donne-t-il d’enregistrer en des localisations étrangères?

C’est le fait de se dépayser. Le dépaysement apporte beaucoup d’inspiration et ça donne d’autres couleurs, d’autres façons d’aborder les choses, surtout avec les musiciens. Ça nous fait vivre une belle aventure musicale chaque fois. C’est un beau cadeau que je me suis fait.

Vous avez interprété en 1974 Free As the Wind, thème du film Papillon mettant en vedette Dustin Hoffman et Steve McQueen. Comment le contact s’est-il établi entre la production et vous?

J’étais avec la Maison RCA, à l’époque. Ils ont obtenu les droits mondiaux pour la chanson. J’ai été chanceux, ils m’ont choisi comme interprète. J’ai accepté avec grand bonheur. Il y avait trois versions : anglais, français et espagnol. Je ne connaissais pas beaucoup l’espagnol, mais quelqu’un est venu me coacher en studio. J’ai beaucoup aimé l’expérience.

Parmi vos multiples classiques, la chanson Quand on est en amour en est un notable. Quelle relation avez-vous avec cette chanson?

C’est une chanson qui m’a été offerte par un policier de la Ville de Montréal, Robert Laurin. Il m’a dit que si j’aimais la chanson, il me la donnait. J’ai dit ‘’premièrement, on ne donne pas une chanson’’ et, deuxièmement, j’ai écouté la chanson. J’ai trouvé qu’il y avait quelque chose. J’ai soupé chez Robert et, après, sur le coin de la table dans la cuisine, j’ai sorti la vieille Gibson de mon père. On a restructuré et c’est là que la chanson a pris naissance. C’est pour moi, de loin, mon plus grand succès.

Vous avez fondé « Les Fabuleux élégants » en 1998, ce qui vous a amené en tournée européenne. Parlez-moi de ce projet.

C’était un beau party de band de garage avec des musiciens ferrés (Jeff Smallwood, Bourbon Gautier et William Dunker). Dunker était un Belge Wallon. Nous avions composé une chanson qui se nomme Djan Pinson pendant la crise du verglas. Les gens étaient sinistrés. On allait les réconforter en donnant des spectacles et on les divertissait. Cette chanson est arrivée juste au bon moment. La chanson fitait dans le contexte du verglas. Quand on a enregistré la chanson, on a constaté la chimie et on a décidé sur le moment même de se faire un album. Plus tard, on est arrivés avec trois chansons chacun pour un album de douze chansons. Ça s’est fait dans le bonheur. Ça a duré deux ans et ça nous a menés jusqu’en Belgique.

Vous avez collaboré à plusieurs reprises avec Renée Martel. Parlez-moi de vos collaborations.

On s’est connus dans les années 70. On a animé l’émission Patrick et Renée, qui a donné la suite au Ranch à Willie (Lamothe). Elle faisait partie de notre cercle d’amis intimes. She was one of the boys, comme on dit. J’ai toujours eu un grand bonheur de chanter avec elle. On s’amusait beaucoup, musicalement parlant. Quand elle nous a quittés, ça m’a touché profondément. Elle avait une santé fragile; elle est bien et libre, maintenant.

Parlez-moi d’autres collaborations marquantes.

J’ai eu une mini-tournée de treize spectacles avec Gilbert Bécaud dans les années 70, qui a été pour moi tout un événement. C’était une maudite bonne école, venant d’une personne comme lui. C’est un homme très gentil et il avait une énergie…! Ça m’a fait voir le spectacle autrement. J’ai aussi interviewé Garth Brooks. À Nashville, j’ai rencontré mon idole de tous les temps, Chet Atkins, et j’ai passé quelques heures en sa compagnie à parler de guitares et de plein de choses.

Votre santé vous a forcé à cesser la musique temporairement à quelques reprises. Qu’est-ce que cela aurait été pour vous de ne plus pouvoir exprimer votre passion?

Oh, mon Dieu! Ça a été toute une aventure, ma dernière opération à la main gauche. J’ai été en convalescence pendant plusieurs mois. Je me suis vraiment posé la question si je rejouerais encore. J’ai tiré mon épingle du jeu à cause de la pièce Fine On My Mind, de Jerry Reed. Je me suis dit que si je rejouais de la guitare un jour, je jouerais cette pièce. C’était mon but, ma motivation. Je l’ai fait.

Quel regard portez-vous sur votre carrière?

Je me sens très privilégié et chanceux d’avoir réussi à gagner ma vie en faisant ce que j’aime le plus, c’est-à-dire jouer de la musique, faire des chansons. J’ai rendu des gens heureux à travers ma musique. Faire une petite différence, si minime soit-elle dans la vie de quelqu’un, était de loin ma plus grande récompense!