Montérégie : les assureurs refroidis face aux zones inondables

Le cadre réglementaire modernisé entourant les zones inondables ajoute à la précarité d’assurer sa propriété, particulièrement dans certains secteurs couverts par le journal.

Des propriétaires de résidences situées sur l’île Goyer et dans les zones riveraines de la rivière L’Acadie et du bassin de Chambly, à Carignan, se voient confrontés à un avenir incertain. L’entrée en vigueur de la nouvelle cartographie des zones inondables, annoncée pour le 1er mars prochain, les inquiète. La nouvelle cartographie introduit notamment plus de catégories de risques.

L’île Goyer est clairement identifiée dans les cartes de la ville comme zone contenant des milieux humides, des bandes riveraines et des zones inondables. « Le rêve de résider au bord de l’eau sur l’île Goyer pourrait se transformer, pour certains, en un casse-tête majeur. L’arrivée de la nouvelle cartographie représente à la fois une avancée de sécurité publique et un défi pour les propriétaires », considère un citoyen de l’île. « Ça a un impact direct sur les assurances », confirme d’entrée de jeu Michel Auger, d’AGMA assurances Inc., courtier d’assurance. Il met en reflet le développement résidentiel dans des secteurs inondables. « Les villes ont vendu du terrain sur des bords d’eau potentiellement inondables pour augmenter leur population », estime M. Auger. Il confirme que les réclamations liées aux inondations ont augmenté. « C’est omniprésent, c’est courant. Il y a des gens qui réclament chaque année. Certains se mettent sur pilotis ou ont complètement éliminé leur sous-sol, car leur zone est constamment inondable. »

Sans assurance

Michel Auger explique que les compagnies d’assurance remanient leurs territoires de zones inondables. Quand l’assureur entre l’adresse dans son système, il identifie précisément les enjeux de la zone et valide s’il est « confortable » à offrir l’assurance.

« Quand c’est un risque certain de sinistre, c’est sûr que l’assureur ne veut plus embarquer », dit M. Auger.

Il affirme que des secteurs ne sont tout simplement plus assurables, de façon généralisée, chez les assureurs. « On sait avec certitude qu’il y aura réclamation. Toute entreprise est là pour avoir un certain revenu. On se retrouve avec des clients qui n’ont plus d’assurance, dans une maison d’une certaine valeur. Ils se retrouvent à devoir assumer les dommages », conclut-il. Le courtier mentionne que c’est une réflexion à avoir plus que jamais lors d’un achat. « Comme consommateur, si tu veux t’acheter une résidence sur le bord de l’eau, il faut que tu penses à cette situation. Suis-je en zone inondable? Est-ce un enjeu de me faire assurer? Les clients s’assurent et se rendent compte que ça coûte cher ou qu’ils ne sont plus assurables. »

Ce problème peut également jouer sur le renouvellement d’hypothèque. « Sans couverture, les banques ne veulent pas prendre le risque de se retrouver avec un immeuble qu’elles ne sont pas capables de revendre. Les gens vont avoir de la difficulté à vendre leur immeuble à un prix juste. C’est beau, acheter sur le bord de l’eau, mais il peut y avoir des répercussions plus tard », remarque M. Auger.

Cartographie à venir

La MRC de La Vallée-du-Richelieu (MRCVR) fait savoir que la cartographie de la rivière Richelieu est actuellement en cours de réalisation par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) et entrera en vigueur en même temps que le nouveau cadre normatif. 

Pour les autres cours d’eau, notamment les affluents, la cartographie sera effectuée ultérieurement, après 2026, à partir des données de l’Atlas de l’eau. Cette cartographie est réalisée conformément au guide méthodologique applicable à l’établissement des zones inondables et des zones de mobilité des cours d’eau.

La CMM tient la MRCVR informée de l’avancement des travaux. À ce jour, aucune directive officielle n’a été transmise par la CMM ni par le gouvernement du Québec. Les rôles et les responsabilités des différentes instances pour la diffusion de l’information restent à préciser. 

Devoir se relocaliser

À ce jour, la Ville de Carignan n’a donc pas encore reçu les cartes officielles ni le nouveau cadre réglementaire relatif à la gestion des zones inondables. Les cartes et les règles présentées par le gouvernement l’année passée étaient préliminaires et pourraient avoir évolué d’ici leur adoption officielle.

Des Carignanois se disent craintifs devant l’éventualité de se voir refuser ou limiter la reconstruction de leur maison après sinistre. « Si la Municipalité refuse la reconstruction et oblige de relocaliser le bâtiment hors zone inondable, la valeur du terrain plus bâtiment peut chuter fortement. Même, certains propriétaires pourraient perdre entièrement de leur investissement si le terrain est 100 % en zone inondable à risque élevé », envisagent-ils. La Ville attend de recevoir la version finale avant de se prononcer sur les « répercussions précises » pour les propriétés situées sur son territoire. Dès que les informations officielles seront transmises, la Ville analysera les données avec la MRCVR afin d’en évaluer les enjeux locaux.