Saint-Mathias-sur-Richelieu : musicien indépendant et maître de sa carrière
Au coeur de la tempête entourant la boîte de production Ad Litteram, Adam Karch, musicien de Saint-Mathias-sur-Richelieu, raconte le pour et le contre d’être un artiste roulant sa bosse de façon indépendante.
Dans une enquête du journal Le Devoir, on lit que treize artistes dénoncent les pratiques d’affaires du groupe Ad Litteram. « Parts de redevances faussement déclarées, factures impayées, manque de transparence dans la reddition des comptes » sont notamment soulevés par les musiciens. Dans un second temps, le label musical est sorti publiquement, considérant avoir fait l’objet d’une « campagne de discrédit ».
Après une quinzaine d’années de collaboration, le lien entre Adam Karch et les Productions Bros s’est rompu, en 2023. Il a sollicité plus d’une quinzaine d’agences et de compagnies de disques ciblées en fonction de son produit. Le guitariste soutient qu’Ad Litteram est la seule entité à ne pas lui avoir répondu. « J’étais déçu au début, indique Adam Karch, connu de l’entité musicale. Mais je pense que c’est une bonne chose, finalement », constate-t-il aujourd’hui.
Plusieurs chapeaux
Le Mathiassois s’estime « chanceux et fier » de cheminer à titre d’artiste indépendant et de gérer sa carrière désormais. Cela implique toutefois qu’il doit porter plusieurs chapeaux. Entre trouver ses spectacles, se vendre, négocier et gérer les contrats et les paiements, il oscille entre le volet entrepreneurial et le droit. « Avoir un chèque après un show : j’ai joué, tu me paies, c’est fini. Les histoires de ne pas se faire payer pendant trois, quatre, cinq, six mois, je n’accepte pas ça », considère-t-il. Il a notamment développé ses habiletés pour se faire valoir. Il a fallu qu’il améliore son organisation, entre autres en ce qui a trait à solliciter les festivals au bon moment de l’année, quand l’occasion s’offre temporairement.
Autonome et insécure
Adam Karch vit une pleine autonomie. Il nuance que c’est un couteau à double tranchant. « Ça peut être insécurisant de faire tout ça par toi-même. Tu dois aller chercher le travail dont tu as besoin pour vivre. On se sent seul, des fois », raconte-t-il en ce qui le concerne. À travers ses démarches, il soulève l’importance d’assumer sa valeur. Il demande habituellement 1 500 $ par spectacle. « Pendant des années, des gens m’ont dit que je valais ça. J’ai fini par le faire », dit-il.
Utilité des agences
Bien qu’indépendant, le musicien ne botte toutefois pas dans la ruche. Il tient à préciser qu’une grande majorité d’agences effectuent un travail pertinent et utile. Il reconnaît avoir été « très gâté » avec les Productions Bros. « Quand ils font bien leur job, ça t’enlève toute une lourdeur », admet-il.
En 2024, après avoir sorti plusieurs albums sous les Productions Bros, il lançait pour la toute première fois un album en tant qu’artiste indépendant. Il a dû avancer quelques sommes d’argent de sa poche. En tant qu’artiste solo, cela a cependant limité ses dépenses. « Tout à coup, ne pas avoir un chèque de 15 000 $ pour faire ton album, ça change tout », convient-il.
Se produire soi-même
Il s’est enregistré chez lui. Il a pris des conseils auprès de professionnels de l’industrie afin de peaufiner cet aspect et il a loué des micros. « Une journée, je ne le sentais pas pour enregistrer, j’ai fait autre chose. Le lendemain, c’était très productif », identifie-t-il. Cet album lui a coûté environ 3 000 $. Il a ensuite fait imprimer 500 disques compacts pour approximativement 2 000 $.
Il se sent bien dans ce nouveau modèle qu’il a apprivoisé. Il rappelle que de ne pas avoir de maison de disques n’est pas synonyme d’échec. « Ça m’a pris du temps pour comprendre ça. Je pensais que j’avais échoué quand je n’ai pas trouvé d’équipe. Je pensais avoir tout perdu. Mais c’est une illusion, car j’y étais habitué. Je n’ai rien perdu, j’ai tout appris », remarque-t-il.
Sans être sous les projecteurs qui éclairent la scène contemplée par le grand public, Adam Karch mise sur ce en quoi il performe. « Je suis comme une ombre dans la musique, un peu. Je joue partout, mais je ne suis pas head line (tête d’affiche) », soutient le travailleur autonome avec lucidité. Festivals, campings et fêtes privées font partie des lieux où il se déploie. Pendant l’été, à raison de deux représentations par semaine, il amasse 3 000 $. Il chiffre faire entre 60 et 125 spectacles par année et obtenir de ceux-ci un montant net de 50 000 $ à 60 000 $. Brian Slacks, un allié, l’aide à trouver de 10 à 15 spectacles. « Au-delà des chiffres, je vis bien. Je suis libre plusieurs jours par semaine et je passe du temps sur mon bateau. Je suis comme un semi-retraité », établit l’homme de 46 ans, qui travaille trois ou quatre jours par semaine.
Les 4 et 5 juillet, l’artiste sera au fameux Resto-Pub Ancien Magasin Général, à Godbout. Il sera aussi au Festival du blues de Tremblant les 10 et 11 juillet. Plus de dates sont publiées sur son site Web.