Des « jeunes » et des « vieux »

L’Association des professionnels de l’industrie de l’humour (APIH) revient sur le Gala Les Olivier, dépeint par certains comme « méprisant » de la part de la « nouvelle garde » d’humoristes envers « les plus anciens ».

Marie-Eve Lapierre, propriétaire de la boîte de gérance chamblyenne l’Agence Feedback, fait partie du conseil d’administration de l’APIH. Le gala qui honore les humoristes du Québec est une coproduction entre Radio-Canada et l’APIH.

La soirée a été animée par Katherine Levac. En 24 ans, ce n’est que la troisième année qu’une femme anime seule le gala en question. Au lendemain de l’événement, « âgisme » et « place quasi inexistante des vétérans de l’humour » ont fait partie des commentaires soulevés. « Le mépris de la nouvelle génération d’humoristes pour l’ancienne semble être assez généralisé », a écrit en ce sens Dany Turcotte, sur ses réseaux sociaux.

« On a eu beaucoup de jeunes, cette année. On ne s’en cachera pas. Mais on n’a pas ignoré la cinquantaine et plus. » – Joanne Pouliot

Joanne Pouliot, directrice générale de l’APIH et productrice exécutive du Gala Les Olivier, s’est dite surprise. « Il y avait quand même des gens d’une certaine génération qui étaient présents », défend-elle. Elle énumère Patrick Huard, Pierre Brassard, Guy Jodoin, France Castel, Louise Latraverse, etc. « Je ne peux pas dire qu’il y avait juste des jeunes. Il faut comprendre que dans une production du genre, quand on appelle quelqu’un, il peut arriver que la proposition qu’on lui fait ne lui convienne pas pour toutes sortes de raisons », explique la productrice exécutive. Elle ajoute avoir souhaité ratisser large pour la production et avoir pensé « à la diversité sous toutes ses formes ».

Beaucoup de jeunes

La présence des jeunes humoristes a été la tendance remarquée. « On a eu beaucoup de jeunes, cette année. On ne s’en cachera pas. Mais on n’a pas ignoré la cinquantaine et plus non plus », renchérit Mme Pouliot. Plus que jamais, ‘’l’inclusion’’ est nommée comme une ligne de conduite à suivre. Sommes-nous en train d’assister à un clivage entre deux clans en humour, les jeunes et les vieux? « Je ne suis pas prête à dire ça. On a vu des jeunes travailler avec des plus vieux dans les numéros particulièrement. On essaie de mélanger les générations et les styles. Des vétérans vous diront que les jeunes peuvent être bien stimulants à innover et à faire les choses différemment », fait remarquer la directrice générale de l’APIH.

Je me souviens

L’humoriste chamblyenne, Silvi Tourigny, et Mathieu Dufour, représenté par la boîte chamblyenne l’Agence Feedback, ont présenté ensemble le prix du Spectacle de l’année. Avant de dévoiler le gagnant, ils ont souligné des anniversaires importants dans le milieu de l’humour. Personnifiant son personnage de Carole, Silvi Tourigny a mentionné les 40 ans du numéro The Pink Panther, d’André-Philippe Gagnon. En reproduisant le son du saxophone que l’on entend dans la musique du film The Pink Panther, André-Philippe Gagnon a créé l’un de ses classiques absolus. Préservant le mystère, Silvi Tourigny a reproduit la chanson thème en imitant la mélodie au saxophone, sans nommer le numéro ni l’humoriste. « Je t’avais dit que le monde n’allait pas comprendre », lui a lancé Mathieu Dufour. Est-ce que les humoristes actuels ont une notion de ce qui s’est fait avant eux? « C’est de l’humour. Il ne faut pas tout prendre au premier degré. Il y a plein de choses qui se disent qui sont farfelues et qui se veulent drôles. Il ne faut pas s’offusquer du moindre mot. Ça fait partie du métier que de provoquer un peu et d’inciter à la réaction », nuance Mme Pouliot.

Un hommage trop court?

Le 18 novembre dernier, le Québec perdait l’un de ses monuments. L’acteur, humoriste, chanteur, homme politique, auteur-compositeur-interprète, Jean Lapointe, décédait à l’âge de 86 ans. L’épouse de M. Lapointe ainsi que sa fille étaient présentes dans la salle lors du Gala Les Olivier. Un hommage de 40 secondes a été présenté à l’artiste qui, lui, en a inspiré de nombreux. Des chroniqueurs ont pointé du doigt l’hommage, le considérant trop court pour la grandeur de l’œuvre de l’homme. « Je l’ai approuvé, donc, j’étais d’accord avec cette façon de faire-là. J’ai parlé à la succession de Jean Lapointe avant d’aller plus loin et ils étaient d’accord avec cette approche-là. Les deux étaient enchantées de ce que l’on a fait. Quand on pense que d’autres galas parlent d’une trentaine de décès de l’année en deux minutes, je pense que l’on a bien traité son départ », fait savoir la DG.

Une « grande réussite »

Joanne Pouliot parle d’une « grande réussite » en mentionnant le Gala Les Olivier 2023. Elle salue le travail de Katherine Levac et son équipe. « Parfois, certaines années, il y a des creux de vague. Ça n’a pas été le cas cette année. On a conservé l’ambiance qui se voulait très rassembleuse », décrit-elle.

Une cote d’écoute de 835 000 téléspectateurs a été chiffrée le soir même. En comptabilisant les données confirmées, qui sortiront la semaine prochaine, il ne serait pas étonnant d’atteindre le million. « On a joint plusieurs générations et plusieurs styles », termine la productrice exécutive.

À propos de l’APIH

Créée en 1998, l’APIH rassemble, sur une base volontaire, les différents acteurs de l’industrie de l’humour, soit auteurs, gérants, agents, producteurs, diffuseurs, organismes et, bien sûr, les humoristes. Depuis plus de 20 ans, l’APIH poursuit sa mission de participer activement à l’essor de ce secteur de la culture québécoise et d’en assurer le développement. Elle œuvre à sa promotion au Québec en produisant le Gala Les Olivier, récompensant chaque année le travail des artisans de l’humour.

L’APIH offre à ses membres tout le soutien nécessaire à leur cheminement ainsi qu’une vitrine sur le monde de l’humour actuel et met à leur disposition les outils essentiels à leur évolution.