Chambly : le destin de Michelin
Artiste et homosexuel assumé, Michel-Maxime Legault présente un spectacle sur sa vie. Et si le jeune enfant élevé dans les champs de Montérégie était resté sur son tracteur?
« Que serait ma vie d’homme hétérosexuel dans les champs? » Michel-Maxime Legault tente de répondre à cette question à travers son spectacle Michelin, en représentation le 8 novembre au Pôle culturel de Chambly.
« Au fil de mes représentations, je vois que plusieurs personnes se reconnaissent dans ce discours. » – Michel-Maxime Legault
Le titre, Michelin, est loin d’être anodin pour le quadragénaire qui a grandi dans les champs de Saint-Polycarpe, un village coincé entre Coteau-du-Lac et l’Ontario. « J’étais le dernier de sept enfants, confie-t-il. Ainsi, mes parents voulaient donner leur prénom aux deux derniers. À ma naissance, ma mère Micheline voulait donner son prénom. Mais comme j’étais un garçon, ils voulaient m’appeler Michelin. Ma soeur est intervenue en soutenant à mes parents que je n’étais pas un pneu! Dans mon récit, j’ai intégré un peu d’autodérision. »
En décalage total avec le monde de son enfance, Michel-Maxime Legault tient à porter son message dans les régions du Québec et surtout en Montérégie, où il a grandi. « Je suis né dans une famille que j’aime, mais ma différence rendait mon émancipation plus difficile. Au fil de mes représentations, je vois que plusieurs personnes se reconnaissent dans ce discours. »
Un rêve
Sa différence? Le jeune garçon la constate au quotidien. « C’était en 1993. Je vois l’émission Fort Boyard à la télévision. Dès lors, mon rêve est d’y participer! Mes frères et sœurs m’ont expliqué que pour cela, il fallait être artiste. C’est ainsi que ma carrière a commencé. J’ai entamé une formation en piano classique, puis au Conservatoire en art dramatique de Québec. J’ai demandé un piano à mes parents et j’ai appris seul. Mes parents croyaient en mon rêve et ils ne m’ont jamais mis de bâtons dans les roues. »
En parallèle de sa carrière d’artiste qui débutait, les travaux à la ferme étaient nécessaires. Des tâches qui ne contribuaient pas au bonheur du jeune homme. « Dans la famille, les enfants s’occupaient de la ferme. Mais moi, je n’étais pas très bon. À 11 ans, j’étais sur un tracteur et j’égorgeais des poulets. Nous avions beaucoup d’animaux sur notre terre et la mort était quotidienne. Pour un hypersensible comme moi, c’était dur, car j’étais toujours dans le deuil. Certains ont une image bucolique de la ferme, mais moi, non. J’étais tout le temps dans les champs pendant que mes amis allaient au parc. On s’autorisait une journée en vacances en famille et on allait au parc pour nourrir d’autres animaux! »
En revanche, Michel-Maxime Legault trouvait aussi son bonheur dans d’autres lieux. « J’adorais l’école, souligne-t-il. Quand elle commençait, je me sentais en vacances. Lire un livre m’amusait aussi beaucoup. Aussi, j’adorais les journées de pluie, car cela permettait de ralentir l’activité sur la ferme. »
Une certaine sérénité
Puis, l’heure de la révélation est venue lorsqu’il a annoncé à ses parents son homosexualité. « Ils ne comprenaient pas ce que c’était, ils pensaient que c’était une maladie. Aujourd’hui, mon père me prend dans ses bras. C’est beau de pouvoir constater son évolution. »
À 43 ans, le cadet de la famille s’est réalisé en tant qu’artiste. S’amusant de sa jeunesse dans les champs, il avoue quand même y retourner volontiers. « Que serait ma vie si j’étais hétérosexuel dans les champs? Je ne sais pas. Si j’avais écrit ce spectacle à 20 ans, peut-être que le contenu serait plus acide. Mais je suis heureux de retourner voir mes parents. Ils sont encore beaux malgré les drames qu’ils ont vécus et qui les ont sortis de leur zone de confort. Je suis tellement fier d’être né à Saint-Polycarpe. »
Michelin, le samedi 8 novembre à 20 h, au Pôle culturel de Chambly. Tarifs : de 23 $ à 50 $.
