Du privé au public

Josée Goupil est une infirmière auxiliaire de Chambly qui a choisi, il y a quelques semaines, de fermer son cabinet de soins privés pour aller prêter main-forte au système de santé public. Elle travaille présentement aux prélèvements de la COVID-19 et fait du dépistage.

Il y a un peu plus d’une dizaine d’années, Josée a quitté le réseau de santé public pour ouvrir son propre cabinet en prises de sang et en soins des pieds à Chambly. « Je travaille de chez moi en temps normal. Pour moi, les soins humanitaires, c’est super important. On ne devrait pas traiter les gens comme des numéros. C’est pour cela que j’ai été motivée à démarrer mon entreprise. Mais la pandémie m’a fait me sentir impuissante. »

« Je suis vraiment en zone de guerre. » – Josée Goupil

Josée raconte qu’elle n’a pas supporté voir ses confrères et consœurs travailler au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) « en étant épuisés et en manque de ressources », sans tenter d’alléger leur charge. « C’est sûr que j’étais bien dans mon petit confort, ayant ma clientèle régulière et ne travaillant ni les fins de semaine, ni les soirs, mais j’ai senti l’appel d’aller les aider, car j’en avais les capacités. Je me serais sentie vraiment égoïste de ne pas aller prêter main-forte au réseau de la santé, qui est en train de s’écrouler. Maintenant, je fais du dépistage de COVID-19. Je suis vraiment en zone de guerre. Je travaille en clinique fixe et non pas mobile. »

L’importance des services privés

Pour Josée, pas question de lancer la pierre aux travailleurs du secteur privé qui font un choix différent du sien. Car même lorsqu’elles ne sont pas mobilisées dans le secteur public, les ressources des services privés « désengorgent le système. On a aussi vraiment besoin des services privés. Pour les prélèvements de sang, avant, tu avais seulement le choix d’aller au CLSC ou de te tourner vers Danacare ou Biron. On passe d’un service gratuit mais achalandé à devoir payer 500 à 600 dollars. Mon laboratoire a une entente de services avec l’Hôpital du Haut-Richelieu. Un service intermédiaire entre nous permet aux gens de bénéficier d’un service de prélèvements privé pour une modeste somme, tout en faisant analyser leurs échantillons à l’hôpital. Ça permet aux gens d’avoir plus d’options et de limiter le temps d’attente. Moi, je dis que l’on désengorge le système. »

Josée décrit le travail au dépistage comme un « travail à la chaîne. Le gouvernement demande tellement de dépistages que l’on a des patients toutes les sept minutes. On est en position debout de façon prolongée. On les enchaîne les uns après les autres, on est comme des robots. Dans les cliniques fixes, on est la ligne de front, car on accueille la population générale qui a des symptômes et cela inclut aussi le personnel de la santé, car ces personnes ne peuvent aller se faire dépister dans leur lieu de travail. »

Josée évoque aussi le fait que beaucoup d’effectifs se font déplacer d’un secteur et d’un hôpital à l’autre. « En ce moment, je travaille notamment avec des retraités, des hygiénistes dentaires et des nutritionnistes qui ont été rapatriés en renfort au dépistage. Tous les milieux viennent nous aider. »

Éclosions dans les écoles et les CHSLD

« On ne comprend pas ce que l’on voit de l’intérieur de l’œuf. Le gouvernement nous parle de baisse de cas, mais nous, ce que l’on voit, ce sont des éclosions dans les écoles, dans les hôpitaux et les CHSLD, dont il ne parle pas. La semaine passée, nous avons installé une clinique fixe à l’Hôpital du Haut-Richelieu pour les employés parce qu’il y a des éclosions partout et, en ce moment, ce sont les joueurs qui tombent malades : les infirmiers, les médecins attrapent la COVID-19. On perd des joueurs, on est en grand manque de personnel. »

« Je vois beaucoup de jeunes du secondaire, qui se sentaient au-dessus des lois et qui n’écoutaient pas les recommandations de la santé publique. Le couvre-feu aidera probablement à cet égard. Mais dès la fin de semaine qui a suivi la rentrée scolaire du 11 janvier, on a commencé à dépister des écoles. On a dépisté pas mal d’élèves de deuxième secondaire qui allaient à l’école à temps complet. » Mère d’enfants qui sont aux niveaux primaire, secondaire et universitaire, elle est d’avis qu’il faudrait fermer les écoles. « J’étais fâchée. Je pense que le gouvernement fait ça tout simplement parce que l’on a besoin de garderies. On a fait passer l’économie avant la santé et ça m’a déçue. »

Notons que depuis la rentrée, plusieurs cas de COVID-19 ont été recensés dans les écoles de notre région, notamment à Monseigneur Euclide-Théberge, à Marieville, où plusieurs parents témoignent d’une hausse de cas, bien que le Centre de services scolaire des Hautes-Rivières (CSSDHR) nous ait assuré qu’il ne soit pas encore question d’éclosion dans aucune de ses écoles.