Couvre-feu : moins de patients aux soins intensifs

Avec Denis Grondin, président du Syndicat des professionnelles en soins de la Montérégie-Centre (FIQ-SPSMC), le journal fait le point sur les retombées positives du couvre-feu sur le réseau de la santé et les défis auxquels font face les ressources en soins intensifs.

« On a dû faire des ouvertures de lit dans notre Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS). À Charles-Le Moyne, on a été très touchés, il a fallu ajouter 21 lits supplémentaires dans le secteur des soins intensifs (SI), et on prépare l’Hôpital du Haut-Richelieu à l’éventualité qu’il faudra y accueillir des patients si l’on déborde à Charles-Le Moyne. On manque beaucoup de personnel. Présentement, chaque infirmière a deux patients. Ce n’est pas comme une unité de médecine dans laquelle on peut se permettre d’avoir cinq ou six patients. Pour six patients en SI, il faut douze infirmières pour 24 heures, c’est ce qui mène à un certain délestage. » M. Grondin raconte que beaucoup de professionnels ont dû être transférés en soins intensifs parce que l’on considérait qu’ils avaient un bagage pertinent. « Ça n’a pas fait l’unanimité chez les professionnels, car ça déstabilise. »

Une aide à mieux encadrer

Selon M. Grondin, il faut être conscient du fait que l’aide apportée d’urgence dans les CHSLD, lorsqu’on en avait besoin, ne requérait pas la même formation que celle servant à prêter main-forte en soins intensifs. C’est une autre paire de manches, « non pas parce que c’est plus dur, mais parce que la formation nécessaire pour œuvrer aux SI est longue. Lorsqu’on parle de soins intensifs, on parle de formations qui peuvent durer entre quatre et six semaines ».

« Même une courte période de deux ans sans avoir travaillé aux soins critiques est considérable et amène une certaine inquiétude. » Ce serait donc un retard difficile à rattraper. « Certaines infirmières ont été transférées, de l’Hôpital du Haut-Richelieu par exemple, directement à Charles-Le Moyne, non pas par choix volontaire, mais parce qu’on le leur a imposé. »

« (…) on est obligés de donner raison à notre premier ministre, le couvre-feu semble porter fruit. » – Denis Grondin

Certains travailleurs de la santé du secteur privé font aussi le choix de délaisser leurs activités et leur clientèle pour travailler dans le réseau public et lutter contre le fléau qui sévit. C’est le cas de Josée Goupil, infirmière auxiliaire, qui a annoncé le 11 janvier dernier qu’elle fermait son centre de prélèvements sanguins à Chambly, à cet effet. « Je vais fermer temporairement pour donner mon aide au réseau de la santé à temps complet, au CISSS de la Montérégie Centre, dû à la pandémie qui est trop présente et au système en manque de personnel. J’ai donné mon nom à temps complet pour quelques mois. » Débordée, elle dit travailler « sept jours sur sept ».

Les effets du couvre-feu

Quant aux chiffres des derniers jours, présentés par le gouvernement et la santé publique, M. Grondin les voit d’un bon œil. « Le nombre de patients aux soins intensifs a diminué. On était inquiets à Charles-Le Moyne et on appréhendait un débordement, mais présentement, on se dirige plutôt vers le contraire, soit une baisse. Donc, au lieu des 21 lits, aujourd’hui (21 janvier au moment de l’entrevue), on a 10 lits qui sont occupés par des patients, alors qu’il y a une semaine, on a atteint le compte de 18. C’est encourageant. On voit une différence et on est obligés de donner raison à notre premier ministre, le couvre-feu semble porter fruit. Ça ne peut qu’aider. Je dirais à la population de ne pas lâcher. Il faut penser aux infirmières et aux préposés aux bénéficiaires, qui sont sur le plancher depuis neuf mois et qui s‘empêchent de voir leurs familles pour se consacrer à donner des soins sécuritaires. »