Une promotion trouble
L’utilisation d’un code promotionnel « Poly », créé par la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu, n’est pas bien reçue de la part de Josée Daigle, directrice de Ainsi soit-elle centre de femmes, à Chambly.
« C’est insultant. Ça manque de jugement. Ça manque de compassion. C’est d’un ridicule! », résume Josée Daigle devant le fait accompli. La Coalition fait appel au mot »Poly » afin de promouvoir l’achat de marchandises sur son site Web. Tracey Wilson, vice-présidente des relations publiques de la Coalition, avait notamment fait la promotion de cette offre dans un tweet publié le 20 novembre dernier. « Économisez 10 % avec le code promotionnel POLY », annonce la VP sur son compte.
« C’est insultant. Ça manque de jugement. Ça manque de compassion. C’est d’un ridicule! » – Josée Daigle
Le tout arrive en synchronisme avec la fin de la campagne des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes, qui avait débuté le 25 novembre dernier. Le segment se solde le 6 décembre, une date marquante pour de mauvaises raisons au Québec. En effet, 33 ans plus tôt, en 1989, à Montréal, un homme armé avait assassiné 14 femmes à l’école Polytechnique Montréal parce qu’elles étaient des femmes.
L’utilisation du code promotionnel »Poly » a soulevé l’indignation du côté de PolySeSouvient, un regroupement de diplômées et d’étudiantes de Polytechnique Montréal qui fait pression pour un contrôle plus strict des armes à feu au Canada.
12 jours d’action
Les activités ont déboulé au sein du centre pour femmes Ainsi soit-elle, dans le cadre des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes. Les femmes ont pu se regrouper et échanger, particulièrement lors du visionnement de la vidéo traitant de la violence sexuelle mise de l’avant par le centre. Pour l’occasion, une trentaine de femmes étaient présentes, en ce qui a été décrit comme étant une journée riche en émotions. « On se rend compte qu’une grande majorité des femmes a vécu un ou des épisodes de violence. Il y a 30-40 ans, on ne mettait pas de mots sur ces violences. Aujourd’hui, on en met et les femmes parlent beaucoup plus », met en reflet la directrice du centre Ainsi soit-elle.
Pour commémorer notamment la tuerie du 6 décembre, le centre Ainsi soit-elle affiche à l’extérieur un drapeau noir orné d’une boucle blanche. Les photos et les noms des femmes assassinées cette année au Québec y sont aussi visibles. « On fait un mur en mémoire de ces femmes et des 14 victimes de la Polytechnique », identifie Mme Daigle.
Débordé plus que jamais
Josée Daigle souligne que son centre est débordé plus que jamais. « On sent beaucoup de détresse », remarque la directrice. Elle note l’augmentation du nombre de jeunes femmes ayant recours aux services offerts par Ainsi soit-elle. « Il y a beaucoup de demandes individuelles et de femmes qui assistent à nos ateliers. C’est un feu roulant », constate la directrice.
Elle note que ce qui se démarque des années précédentes, c’est la difficulté financière que vivent les femmes. « Au niveau du logement, c’est très difficile. On a des femmes qui vivent dans leur voiture », dit Josée Daigle, dont l’organisme contribue à la relocalisation de ces femmes. Avec l’aide de la communauté, des déménagements ont même été organisés. « Ça a été une année exigeante, mais extrêmement solidaire », résume-t-elle.
Une maladresse?
Au sein de sa loi C-21, le gouvernement fédéral veut inclure une définition permanente de ce qui constitue une arme d’assaut prohibée dans sa loi pour renforcer le contrôle des armes à feu, actuellement étudiée par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Or, un amendement, récemment proposé au projet de loi C-21 sur le contrôle des armes à feu, viendrait élargir la définition de ce qu’est une arme d’assaut, et donc d’interdire davantage d’armes.
Un acteur inattendu se joint à la discussion et fait réagir le Québec. Publiquement, le gardien du Canadien de Montréal, Carey Price, unit sa voix à celle de la Coalition canadienne pour les droits des armes en critiquant le remaniement sur le contrôle des armes à feu. L’athlète dénonce le projet de loi C-21 du gouvernement libéral, dont l’objectif est de bannir les armes de poing au Canada. Sa publication :
« J’aime ma famille, j’aime mon pays et je me soucie de mon prochain. Je ne suis pas un criminel ni une menace pour la société. Ce que Justin Trudeau essaie de faire est injuste. Je soutiens la Coalition pour garder mes outils de chasse », écrit le gardien, hors du jeu pour une longue période, dans une publication où il s’affiche en tenue de chasse, arme à la main. La déclaration enflamme les réseaux sociaux et suscite des dizaines de milliers de réactions.
La sortie publique controversée pour les armes à feu de Carey Price force le Canadien de Montréal à s’excuser. L’organisation historique confirme que son cerbère n’avait pas connaissance de la tragédie liée Polytechnique Montréal.
Puis, contre toute attente, le gardien de but étoile déclare sur ses réseaux sociaux que, contrairement à l’information diffusée par le Canadien de Montréal la veille, il était déjà au fait de la tuerie de Polytechnique du 6 décembre 1989.