Un voisinage impuissant

Des citoyens mécontents du quartier Le Bourg, à Chambly, assistent aux premières pelletées de terre sur le lieu où s’érigera un restaurant McDonald’s, au coin du boulevard Fréchette et de la rue Anne-Le Seigneur.

« Je fais probablement partie de ceux qui auraient aimé qu’il y ait une autre offre que ça », convient Jean-François Molnar, conseiller du 8e district, dans lequel le restaurant prend racine. L’élu se dit très sensible à la cause des citoyens du quartier Le Bourg. Quand il s’est présenté aux dernières élections municipales, la grogne se faisait déjà entendre à propos du projet. « On a cru jusqu’à la dernière minute que l’on aurait pu faire marche arrière sur ce projet, qui est une situation problématique, on va se l’avouer », mentionne le conseiller des Grandes-Terres. À ce stade du processus, il dit vouloir s’assurer que l’intégration du commerce se fasse dans le respect et le plus harmonieusement possible avec les résidants du secteur. « C’est tout ce que l’on contrôle maintenant », se résigne le conseiller. Mathieu Beauregard est citoyen du quartier Le Bourg. Il s’était présenté dans le 8e district lors des dernières élections municipales sous la bannière de Démocratie Chambly. C’est d’ailleurs dans ce district que la lutte avait été la plus chaude. « Ça fait un an que l’on travaillait dans le quartier pour éviter l’inévitable. C’est un beau projet que d’avoir des commerces là, mais ce qui nous embête, c’est vraiment le McDonald’s », cible-t-il.

« Je fais probablement partie de ceux qui auraient aimé qu’il y ait une autre offre que ça. » – Jean-François Molnar

Marc-André Malo est dans le secteur depuis 2017 et il fait partie de ceux qui vivront à proximité du restaurant en devenir. Il a été l’initiateur de la pétition qui avait pour but de freiner le projet. Ce sont plus de 1500 signatures qu’il avait recueillies et transmises à la Ville. « C’est triste de voir que le projet se concrétise malgré nos efforts pour sensibiliser l’administration à le revoir », convient-il. Guillaume Dufour, qui réside dans Le Bourg depuis 10 ans, ajoute sa voix au groupe. « On reçoit ça très négativement », exprime-t-il. Il conçoit la présence d’un second McDonald’s à Chambly comme étant « complètement grotesque ». Il soulève que l’offre en restauration se concentre autour des grandes chaînes et il aimerait une diversité. « Quand on veut manger au restaurant à Chambly, on finit par aller ailleurs », stipule M. Dufour.

Trop peu trop tard?

Parallèlement, lors de la séance de la semaine dernière du conseil municipal de Chambly, les élus ont déposé le projet de règlement visant à interdire tout nouveau service à l’auto sur le territoire de la Ville de Chambly. « Est-ce que cette règle-là pourra s’appliquer dans ce dossier? Si non, quels seraient les recours pour interdire le service au volant à cet endroit-là? », a demandé, lors de la période de questions de la séance, Mathieu Beauregard. Le règlement n’étant pas rétroactif, la mairesse de Chambly, Alexandra Labbé, a répondu que « ça (le règlement) ne concerne pas le projet dont vous parlez. Ça ne touche pas les permis qui sont déjà émis ».

Julie Daigneault, cheffe de Démocratie Chambly et ancienne conseillère du district dans lequel s’implantera le restaurant, avance quant à elle que « le nouveau règlement de la Ville de Chambly arrive trop tard pour contraindre McDonald’s de s’installer ailleurs qu’à l’entrée d’un quartier résidentiel […] l’entrepreneur a débuté des travaux d’excavation. L’espoir entretenu par des citoyens que l’entreprise ait changé ses plans en ne construisant pas de service à l’auto est perdu ».
Au début de 2021, une dérogation mineure avait été adoptée en lien avec l’affichage du restaurant. La permission de cette dérogation ouvrait la porte à une seconde voie de service à l’auto. « Il faut faire appel 30 jours après l’adoption de la dérogation ‘’mineure’’. Les élus ne nous le disent pas, ça. On s’est fait avoir », exprime à regret Jo-Ann Lévesque dont la maison est on ne peut plus collée sur le futur restaurant.

La restauration rapide s’incline

En 2016, l’arrondissement montréalais de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce (CDN-NDG) a décidé de s’attaquer à l’obésité et à la malbouffe en limitant entre autres les établissements de restauration rapide sur son territoire. L’arrondissement a utilisé un règlement de zonage, un outil servant à contrôler l’usage du sol, pour arriver à ses fins. L’objectif était de « promouvoir la santé et les saines habitudes de vie », notamment en restreignant les zones où peuvent s’installer les nouveaux restaurants à service rapide et en les tenant loin des écoles. Dès l’adoption du règlement, des chaînes de restauration rapide ont contesté ce dernier devant les tribunaux. Le plus haut tribunal au pays a tranché il y a deux semaines : les établissements de restauration rapide seront limités à quelques rues s’ils envisagent de s’installer dans l’arrondissement de CDN-NDG. Le jugement démontre le pouvoir d’une Municipalité de réglementer ainsi la restauration rapide. « La récente décision […] vient confirmer que les villes ont un immense pouvoir et les outils nécessaires pour construire des milieux de vie sains », soutient Julie Daigneault. « Le règlement s’applique autour des écoles et non sur l’ensemble du territoire. Aussi, le danger de gérer par le menu est de commencer à décider ce que les citoyens vont manger. Donner cette discrétion au conseil et à moi, c’est beaucoup », répond Alexandra Labbé sur la décision.
Le journal a tenté de joindre McDonald’s Canada mais n’a pas obtenu de réponses à ses questions.

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