Un virage à négocier pour Autobus Chambly
Les chauffeurs d’Autobus Chambly manifestent pour obtenir une augmentation de salaire. Un bâton supplémentaire dans les roues de l’entreprise qui a fort à faire, entre autres, avec la transition actuelle vers les véhicules électriques.
Il était difficile de ne pas les voir mobilisés, la semaine dernière, le long du chemin de Chambly devant leur entreprise. Les chauffeurs d’Autobus Chambly ont manifesté leur mécontentement par rapport à leur salaire actuel. Ils étaient une trentaine à sortir les drapeaux du syndicat CSN, comme Alain Morel du comité de mobilisation. « On vient soutenir les négociations, car la première offre était tout simplement ridicule! Les dirigeants ont de la misère à recruter et certains vont finir par quitter. Ils vont mettre la clé sous la porte! »
La raison du courroux des syndicalistes? Un salaire pas du tout actualisé, selon eux. « La base est actuellement de 20 piastres de l’heure pour être chauffeur alors que les responsabilités sont vraiment importantes. En plus du véhicule, vous êtes aussi chargé de la sécurité des enfants. On comprend que l’entreprise doit faire des profits, mais pas sur le dos des travailleurs! On sait que notre position est favorable et on ne lâchera pas le bâton! On est montés à Québec avec les dirigeants afin de manifester pour avoir davantage de fonds. Maintenant qu’ils les ont, ils ne partagent pas! Ce n’est pas normal! »
Une deuxième négociation est en cours. Une première offre de 24 $ de l’heure, selon la direction, a été proposée mais les représentants syndicaux l’ont catégoriquement refusée. « Certaines compagnies sont prêtes à embaucher les chauffeurs à 28 $ l’heure!, poursuit Alain Morel. Si les négociations n’aboutissent à rien, on est prêts à faire la grève! »
Un budget insuffisant
Dans les bureaux, Philippe Langlois, directeur d’exploitation, espère que la situation se débloquera. Les négociations pourraient trouver une issue heureuse début novembre. L’entreprise propose 40 postes avec des horaires particuliers puisqu’il faut conduire les enfants à l’école le matin et les ramener chez eux le soir. Entre les deux plages, les chauffeurs sont libres de leur temps. « Ici, ce n’est pas carriériste, c’est une PME familiale. On embauche des retraités, voire semi-retraités. On connaît certains chauffeurs depuis très longtemps. Le salaire de base est de 21 $ de l’heure. Ce qui me gêne le plus dans cette histoire est le fait de nous faire passer pour des voleurs alors que ce n’est pas du tout le cas. Les salaires proposés sont plus que corrects et respectent les pratiques du marché actuellement. Nous avons quand même proposé plus de 14 % d’augmentation! »
Les enjeux sont de taille, puisque d’autres conflits de ce genre pourraient bientôt survenir dans la province. « Tout le monde nous regarde dans l’industrie au Québec, car beaucoup de conventions collectives vont s’achever l’année prochaine. Nous donnerons certainement le tempo des négociations suivantes dans toutes ces entreprises. Or, nous avons eu en effet une augmentation de budget de la part des centres de services scolaires, car nous avons tapé du poing sur la table. Mais le budget obtenu ne peut pas couvrir les exigences des chauffeurs. Et pour cette année, la part qui nous a été donnée ne peut pas être renégociée. »
Beaucoup d’investissements
Autobus Chambly vit une période charnière dans son fonctionnement. Si les chauffeurs ne sont pas contents de leurs salaires, l’entreprise doit aussi faire face à un autre enjeu : l’électrification de ses véhicules. « Le ministère des Transports nous pousse à investir dans des autobus électriques, poursuit Philippe Langlois. On bénéficie de subventions régressives, certes, mais un bus de ce type nous a coûté 156 000 $ l’année dernière et 200 000 $ depuis fin avril. Cet investissement est valable sur huit ans s’il n’y a aucun accident. En ajoutant 228 000 $ pour intégrer l’infrastructure afin de les accueillir, l’investissement devient conséquent. »
Après le trafic supplémentaire relativement à la réduction des voies sur le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, la pénurie de main-d’œuvre et la demande d’augmentation des chauffeurs, un autre facteur en ligne de compte : le prix du diesel. « On paie plus de deux fois le prix normal, regrette le directeur d’exploitation. Après la masse salariale, le fuel est notre deuxième plus grosse dépense. C’est difficile pour nous, entreprise familiale, de gérer cette situation, car désormais les entreprises de transport sont de grosses firmes. Dans notre situation, on constate que les gens s’attaquent à une PME. »