Un lourd héritage
À travers son roman Lait cru, Steve Poutré, résident de Saint-Mathias-sur-Richelieu, voit sa jeunesse dans la campagne montérégienne défiler avec un regard neuf. Mais toujours dans un passé tourmenté.
Steve Poutré est un gars de la campagne. Sa jeunesse, il l’a passée avec ses frères dans une ferme laitière à Saint-Ignace-de-Stanbridge avant que son père ne décide de la vendre alors que le jeune homme était adolescent. Son roman Lait cru est inspiré de son vécu.
« J’ai l’impression que la pire chose qui me soit arrivée est d’avoir quitté la ferme. Mes jouets étaient les animaux. J’en ai souffert, mais, avec le recul, notre père nous a donné l’occasion de faire ce que l’on veut. Nous étions libérés du poids lourd sur les épaules que représente l’héritage d’une ferme. »
Le travail au sein d’une ferme est un rêve pour les agriculteurs, mais il est aussi un enfer tant les conditions de labeur peuvent être difficiles. « Peut-être que si j’étais resté à la ferme, je serais devenu fou?, avoue l’auteur. Dans ce roman, j’ai imaginé comment mon enfance aurait été avec un regard d’adulte ayant des problèmes de santé mentale. Ce n’est pas autobiographique. J’ai pris un malin plaisir à modifier les acteurs de ma jeunesse et j’y ai ajouté un peu de sel pour donner une forme encore plus romanesque avec un fil conducteur. Le narrateur est aujourd’hui un adulte dans un hôpital psychiatrique. On peut qualifier le livre de drame psychologique. »
Une vie satisfaisante
Le thème de la santé mentale est bien présent dans son œuvre. Le romancier y souligne la difficulté de vivre dans le monde paysan. « J’ai pu revisiter mon enfance en ajoutant des détails plus sombres avec des hallucinations. Des drames vécus par notre famille ont été dépeints, car cela fait partie de ma vie. Je les ai aussi modifiés pour qu’ils s’inscrivent dans la trame. Il subsiste aussi un parallèle avec les animaux, qui deviennent un écho à la santé mentale. Ce sont des souvenirs d’enfance assombris. J’ai commencé cette histoire au début de la pandémie. Nous étions en pleine psychose sociale. Est-ce que cela a influencé le roman? C’est possible. »
Aujourd’hui, Steve Poutré travaille derrière un ordinateur, dans sa demeure à Saint-Mathias. « Je suis parti à Montréal, mais je n’aime pas le modèle urbain. Je préfère la campagne, sans les responsabilités d’une ferme. Le métier d’agriculteur est très difficile. On ne peut pas se permettre de burn-out, il faut s’occuper des animaux. Écrire ce livre m’a permis d’apprécier ma vie actuelle. »