Programmer son avenir
Ingrid Bennecib est conseillère d’orientation. Afin d’éclairer les parents sur leur rôle dans le choix de carrière de leurs enfants, elle a écrit Les quatre saisons de l’orientation. Présentation d’un guide à mettre dans beaucoup de mains.
« Je ne sais pas quoi faire plus tard. » Ou encore « Je veux être banquier, car c’est bien payé ». « Être pompier, c’est valorisant, car on peut sauver des vies. » À l’adolescence, beaucoup de jeunes tentent de se projeter sur leur vie professionnelle, mais tous ne s’imaginent pas exercer le métier de leurs rêves, car le chemin paraît trop compliqué, les études, trop longues, ou tout simplement, ils ne savent pas quelle profession les attire vraiment. « Les jeunes de 15 ans n’ont pas forcément la maturité nécessaire pour décider du métier ou de la carrière où ils souhaitent s’investir, précise Ingrid Bennecib, conseillère d’orientation. C’est bien correct, mais il faut pourtant choisir une voie après le cégep. Pour cela, il faut rendre accessible son projet d’orientation. Mais rassurez-vous, on n’est pas toujours fait pour un seul métier! »
« On demande aux parents de se bouger avec l’enfant. » – Ingrid Bennecib
Aider le jeune à visualiser son avenir et poser les premières fondations de son projet professionnel. Tel est le rôle d’Ingrid Bennecib, responsable de l’orientation de plus de mille élèves au collège Stanislas de Montréal. La Chamblyenne a écrit Les quatre saisons de l’orientation, un ouvrage dédié aux parents qui ont aussi leur mot à dire pour aider leur progéniture. Mais d’une manière bien précise. « L’idée de rédiger ce livre m’est venue lors d’une remarque d’une maman d’un élève de secondaire en difficulté au sujet de son parcours scolaire. Elle m’a demandé « Et maintenant, je fais quoi? ». J’ai alors décidé de créer quelque chose pour aider les parents. »
Si le jeune doit décider lui-même de ce qu’il veut faire plus tard, si la conseillère d’orientation est chargée d’aiguiller au mieux l’élève, les parents ont aussi une part de responsabilités. Reste à connaître laquelle. « Les parents ne savent pas, car ce n’est pas leur métier, renchérit Ingrid Bennecib. Il faut les aider à s’éveiller à l’orientation. Certains sont trop interventionnistes, d’autres ne disent rien pour ne pas influencer la décision. Les enfants et les parents ne communiquent pas assez sur le sujet. Pourtant, la simple question « Que veux-tu faire plus tard? » n’est pas difficile à poser et résout pas mal de problèmes. Le but de ce livre est de déculpabiliser les parents. La famille vient en complément de l’école. Le plus important est de laisser l’enfant choisir et de ne pas lui projeter certaines peurs, comme « Sera-t-il bien payé? » ou « Sera-t-il heureux? ». »
Des outils pour se renseigner
Soutenir son adolescent sans influencer ses choix, voilà une tâche qui s’annonce compliquée. L’auteure chamblyenne expose certaines solutions. « Aller chercher les informations sur les programmes n’est pas toujours facile. On demande aux parents de se bouger avec l’enfant. Trouver le taux d’insertion d’une profession, aller enquêter sur les conditions de travail, etc. Internet n’est pas suffisant. Il existe plein d’autres outils comme les portes ouvertes des établissements, la participation à des conférences, du bénévolat ou rencontrer des anciens qui étaient dans leur situation. Il est important de l’accompagner, mais pas de tout faire à sa place. »
Si certains adultes sont réticents par peur de ne pas être à la hauteur, Ingrid Bennecib remet rapidement les choses à leur place. « C’est à la portée de tous. Certains pensent qu’ils n’en sont pas capables, car ils n’ont pas fait d’études. Cela n’a strictement rien à voir. Les parents peuvent aussi parler de leur propre travail, sans le fantasmer. Il faut que l’adolescent comprenne que lui aussi travaillera un jour. C’est le rôle des parents de planter cette petite graine dans la tête des jeunes que leur tour arrivera sur le marché du travail. Une bonne partie des adolescents n’a pas conscience de la réalité de la profession de leurs parents. »
Entre la perception d’une profession et la réalité, le fossé peut être grand. Pour que les jeunes puissent réellement savoir vers quelle profession ils s’engagent, Ingrid Bennecib propose des stages d’une journée en entreprise. « Des élèves ouvrent les yeux à la fin de la journée, poursuit la Chamblyenne. C’est aussi une méthode parfaite pour les jeunes qui n’ont pas de réseau professionnel. Nous travaillons avec la plate-forme JeunesExplo, qui permet de trouver des entreprises prêtes à recevoir ces jeunes en observation. »
Poser des questions
Malgré les outils ou les démarches, si l’inconnu réside toujours dans l’esprit d’un jeune quant à son avenir, il est possible de détecter des indices permettant de lancer la perspective professionnelle. Ingrid Bennecib ajoute. « Ce sont juste des questions banales à poser, genre « Qu’aimes-tu faire dans la vie? », « Quelles sont tes passions? ». Un jeune m’a dit un jour qu’il aimait jouer aux jeux vidéo pour ensuite poster sur Internet les solutions afin d’aider ceux qui ont des difficultés à passer des niveaux. On retrouve ici un intérêt pour l’informatique, les nouvelles technologies et une ouverture vers l’entraide. Cela permet de mieux se connaître. L’idéal est de trouver une profession conforme aux valeurs et aux intérêts de la personne. » L’autre enjeu peut être aussi lié à la conjoncture actuelle. Car avant de s’engager dans une voie, il faut s’assurer qu’elle puisse mener à une destination réalisable. « Il est vrai que le tourisme est moins demandeur d’emplois depuis la pandémie, analyse la conseillère. C’est un exemple parmi d’autres. Mais le but est de construire un projet d’information. Cela amène le jeune à se positionner à sa future école, à son futur diplôme, mais aussi à sa spécialisation. Dans ces domaines, il existe une multitude de possibilités. »
Dans son collège, Ingrid Bennecib n’hésite pas à aller dans les classes pour se présenter à l’ensemble des élèves. « C’est une manière de briser la glace. Les conseillers d’orientation sont très sollicités en fin d’année, alors je demande souvent aux jeunes d’anticiper la démarche en programmant un rendez-vous plusieurs semaines en avance. Élaborer la stratégie d’orientation commence là. »
Les quatre saisons de l’orientation, 29,95 $ en librairie; 21,56 $ en format numérique.