Priorité au français!
La rentrée politique a été marquée par plusieurs polémiques concernant notamment des services de santé offerts uniquement en anglais. La langue de Molière se meurt-elle au Québec? Jean-François Roberge, ministre de la Langue française, entre autres, tire la sonnette d’alarme.
La nouvelle session parlementaire a débuté en trombe pour Jean-François Roberge, député de Chambly et ministre de la Langue française. Depuis plusieurs jours, des cas de Québécois se heurtant à une administration purement anglophone sont médiatisés. Le plus souvent dans des établissements de santé sur l’Île de Montréal. « Il est important de prendre conscience que nous vivons une crise linguistique, lance l’ancien ministre de l’Éducation. Le français est en recul à la maison et au travail. Un réveil national est nécessaire! »
« Il faut que chaque personne qui vient au Québec maîtrise le français. » – Jean-François Roberge
Pour reconquérir l’espace public, la CAQ propose ni plus ni moins que l’adoption de la loi 96, qui affirme que la seule langue officielle au Québec est le français. « Nous poserons les gestes qui s’imposent, poursuit Jean-François Roberge. Ottawa travaille actuellement sur une loi qui va dans ce sens et nous allons les aider. » Pour poser davantage son ambition, le député de Chambly souhaite agir sur l’immigration. « Il faut que chaque personne qui vient au Québec maîtrise le français. Nous visons une politique d’immigration 100 % francophone d’ici 2026. C’est un secteur-clé. »
La solution immigration
L’immigration, justement, serait donc un secteur important dans bien des domaines. En cette période de pénurie de main-d’œuvre, l’afflux de migrants est souvent une solution avancée par les chefs d’entreprises et les organisations patronales afin d’apporter des solutions au manque d’employés. Or, le processus de migration en provenance de pays francophones est souvent critiqué pour sa lenteur administrative et sa limitation de visas délivrés à l’année. « Pour ce domaine, le ministère de l’Immigration serait plus à même de répondre, sourit Jean-François Roberge. Mais c’est sûr que nous travaillons en équipe et que nous nous consulterons. Mais au-delà de la francisation, il faut prendre en compte l’intégration sociale. »
Le contexte social, justement. S’il est constaté que plus de 50 % des habitants de l’Île de Montréal parlent de préférence en anglais, il est essentiel de prendre aussi en compte l’exode constaté vers les régions depuis plus de deux ans. Le marché immobilier a explosé à Chambly et, pendant de longs mois, il était impossible d’acheter une maison dans le secteur sans passer par la surenchère. Si des anglophones débarquent dans la Vallée-du-Richelieu, est-ce forcément une mauvaise nouvelle? « Pas du tout, assure le ministre. Le Québec est une société d’accueil. J’invite les Québécois à faire preuve d’un maximum d’ouverture envers les nouveaux arrivants, mais il ne faut pas non plus nous excuser d’exister. Nous avons des valeurs et le français en fait partie. Lorsque des immigrants s’éloignent de Montréal, cela facilite la francisation. »
Contre le serment au roi
Pour le ministre, la Langue française est l’un des chapitres de son secteur. Il faut y ajouter les Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne, les Institutions démocratiques, l’Accès à l’information et la Protection des renseignements personnels ainsi que la Laïcité. Parmi ce large éventail de projets, Jean-François Roberge a établi deux priorités. « Mon premier mandat est bien entendu de stopper le déclin du français. Aussi, je souhaite travailler le projet de loi sur le serment. Je souhaite que le seul serment des députés soit celui prêté au peuple québécois. »
Le serment au roi d’Angleterre serait donc supprimé, un avis que partagent plusieurs députés, dont le trio péquiste Paul St-Pierre Plamondon, Pascal Bérubé et Joël Arseneau. Ces derniers n’ont toujours pas accès au Salon bleu pour participer aux débats puisque présenter serment au roi est une condition sine qua non pour siéger. Une attitude que n’a pas manqué de pointer Jean-François Roberge. « Cela fait huit ans que je siège à l’Assemblée nationale. Des députés péquistes comme René Lévesque ou Pauline Marois ont toujours accepté de prêter serment à la reine. Je m’étonne donc qu’ils ne suivent pas leurs prédécesseurs. Nous travaillons la loi pour la changer. Or, pour la changer, il faut siéger. Il n’appartient désormais qu’à eux de nous regarder travailler de l’extérieur ou de faire leur travail de législateurs. »
La nouvelle présidente de l’Assemblée nationale chargée de gérer cette crise n’est autre que Nathalie Roy, la députée de Montarville, territoire voisin de celui de Jean-François Roberge. « On se connaît bien puisque nous étions déjà ensemble lors des débuts de la CAQ en 2012. Je suis content pour les 125 députés, car je suis convaincu qu’elle effectuera un excellent travail. » Sa réaction concernant les trois députés refusant de prêter serment au roi est justement attendue prochainement.