L’importance de la presse locale pour la ministre de la Culture

Nathalie Roy, députée de Montarville et ministre de la Culture et des Communications du Québec explique sa vision de la presse écrite en cette semaine nationale des journaux

Pour la ministre de la Culture, ça veut dire quoi un journal régional ?

Pour chaque citoyen, ça doit être important, pas que pour la ministre de la Culture, parce que les nouvelles ça commence chez soi, dans son village, dans sa ville. Les nouvelles, c’est ce qui se passe dans notre vie. Le journal local est très important. Moi, je l’ai toujours lu, car on apprend à connaître notre milieu. Ça commence même à l’école, car il faut apprendre aux enfants à lire, à être curieux et à expliquer ce qu’est un journal. Le journal et l’information sont les piliers de notre démocratie. C’est ça qui est important pour une ministre de la Culture.

Est-ce que vous avez une lecture différente en tant que citoyenne, députée, ministre ?

Tout à fait. Il y a des sujets qui vont me toucher comme citoyenne, mais sur lesquels je n’ai aucun pouvoir en tant que ministre. Mais je pense que c’est la citoyenne qui lit le journal.

Vous avez parlé d’éduquer les enfants à la lecture de la presse à l’école. Il y a des initiatives à cet effet de la FPJQ, par exemple, comment pouvez-vous soutenir ces projets ?

Je regarde ça d’un œil très positif et je soutiens tout type d’initiative où l’on va promouvoir l’information de qualité. Quand on parle de l’école, il y a tous les apprentissages, donc toute initiative du genre est plus que louable. Par ailleurs, je ne peux pas modifier le cursus scolaire. Ce n’est pas de mon ressort, mais je peux influencer le ministre de l’Éducation, car nous travaillons ensemble. Mon collègue aura des annonces à faire, mais sachez que j’y ai collaboré : 112 millions de dollars pour les bibliothèques scolaires.

Quel travail le gouvernement a-t-il fait pour la presse écrite ?

En octobre 2018, mon collègue le ministre des Finances et moi avons déposé un plan d’aide solide à la presse écrite, pas pour les autres formes de médias, parce que vous voyez que les revenus publicitaires s’en vont sur les plateformes, et puis vous vivez de revenus publicitaires, c’est ce qui vous permet d’avoir des journalistes et une information de qualité qui est vérifiée. On est arrivé avec ce plan de 50 millions par années pendant 5 ans. On est là-dedans. La portion qui relève de mon collègue le ministre de l’Économie a permis un remboursement des crédits d’impôt sur la masse salariale des salles de nouvelles jusqu’à concurrence de 35 % des salaires qui concernent aussi le personnel des TI. De mon côté, on avait un volet de subvention directe accordée à la transformation numérique. On invite la presse écrite année après année à s’en prévaloir. Au total, la presse écrite dans sa transformation est soutenue sur le plan numérique, pour aider à l’adaptation du plan d’affaire avec les nouvelles réalités technologiques. Il y a aussi un volet pour la récupération. Les sommes que les journaux doivent payer en vertu de leurs obligations avec Recyc-Québec, c’est une fortune. Cette année j’ai envoyé 9,7 millions à Recyc-Québec pour remplir les obligations. Ce sont différentes mesures qu’on a prises pour aider la presse écrite.

Comment avez-vous vu évoluer, la presse et l’information, lors de ces 20 dernières années ?

J’ai eu le grand privilège, après mon barreau, de pouvoir rentrer à la télévision de Radio-Canada à Sherbrooke. On est en 1990. On a un bulletin de nouvelles à 18 h, on a la journée au complet pour faire son reportage, pour faire de belles images, des entrevues. Ce que j’ai vu au fil des ans avec les nouvelles technologies, l’arrivée du direct et l’arrivée des chaînes d’information en continu, j’ai vu le changement de la profession avec l’accélération de l’information et de la façon de travailler. C’est infernal ! C’est très pertinent mais cela vient complexifier le travail. J’ai vu de plus en plus les sources d’informations se multiplier, mais pour le journaliste, le temps de compréhension et d’analyse diminuer. Le métier de journaliste est de plus en plus difficile.

Que pensez-vous des informations qui circulent dans les réseaux sociaux?

Ce ne sont pas de vrais journalistes. Un journaliste, avant d’aller en ondes, devrait avoir deux sources. Il faut vraiment faire attention à ça. C’est pour ça qu’en tant que ministre de la Culture, il est important de soutenir les vrais médias d’information. On ne peut pas s’improviser journaliste, je ne crois pas.

Est-ce que le gouvernement du Québec peut taxer ces grandes plateformes comme envisage de le faire le gouvernement fédéral ?

En fait elles sont déjà taxées depuis 2019. La taxe de vente sur les plateformes est déjà appliquée. Les taxes s’en vont dans le fonds consolidé, qui est réparti dans les différentes missions de l’État. Donc, quand on arrive avec un programme de 250 millions de dollars pour soutenir nos 150 journaux, ça vient de là.

Qu’est-ce qu’on peut faire à Québec avec ces plateformes où il est possible de lire tout et n’importe quoi ?

Nous faisons des réunions là-dessus. C’est très difficile. Tout le monde a sa page Facebook. Moi aussi, j’ai une page parce que c’est un outil de communication, mais s’il n’en tenait qu’à moi, je n’y serais pas. Cela crée une fichue dépendance en plus. C’est très dur à policer. Même les réseaux sociaux n’y arrivent pas. C’est pour cela qu’on a besoin des médias qui vérifient les choses.

Avez-vous d’autres mesures pour le soutien de la presse écrite dans le futur ?

Oui, mais je ne peux pas vous en parler pour le moment. Un exemple, cependant : pendant la pandémie, comme les revenus des journaux, un service essentiel, tombaient à plat, on en a profité pour se concentrer sur eux et les soutenir financièrement avec de vastes campagne de publicité. On va faire d’une pierre deux coups. On va informer la population et on va aider les médias. En tout c’est 13,5 millions de dollars qu’on donne chaque mois dans tous les médias du Québec.

Comment voyez-vous la critique dans les médias?

Il faut regarder l’intérêt supérieur. Lorsqu’on est un élu ou une élue, on est continuellement opposés à la critique, ce sont les règles du jeu. Jamais l’opposition ne va soulever un bon coup. C’est au journaliste de séparer le bon grain de l’ivraie. Nous sommes toujours sur la sellette. S’il fallait décider de nos actions en fonction de ceux qui nous aiment ou pas… Donc, c’est l’intérêt supérieur qui prime ici, c’est d’avoir une presse écrite forte au Québec. Avec de l’information de qualité. C’est ça qu’il faut. Je souhaite que les journalistes soient là pour la recherche de la vérité.