Les retraités en renfort
Chambly À l’âge de partir en retraite, Rose Cloutier travaille à mi-temps au Mc Donald’s de l’avenue Périgny. Une activité qu’elle n’envisage pas d’arrêter pour le moment dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre qui secoue l’ensemble du Québec.
Que vous soyez au volant ou au comptoir, elle pourrait bien être le premier sourire que vous verrez au Mc Donald’s de l’avenue Périgny. À 70 ans, Rose Cloutier ne compte pas partir en retraite et préfère s’affairer à servir les clients du fast food : « J’aime travailler. Cela me maintient en forme. Je m’occupe de tout sauf de la cuisine. »
« Ici, j’arrêterai quand je serai tannée, tout simplement. » – Rose Cloutier
Alerte, elle vient travailler trois jours par semaine où l’enseigne n’a pas hésité à inscrire « Bienvenue aux retraités » afin de lutter contre la pénurie de main-d’oeuvre qui touche plusieurs domaines essentiels au Québec : « J’ai travaillé des années dans le communautaire », explique-t-elle. « J’aidais les personnes victimes de violences conjugales ou de déficiences mentales. J’étais altruiste. Ici, j’arrêterai quand je serai tannée, tout simplement. »
10,7 milliards de $ de pertes
Le cas de Rose Cloutier n’est pas isolé. À Chambly comme un peu partout au Québec, plusieurs personnes âgées ont enfilé le bleu de chauffe pour supporter les PME qui souffrent d’un cruel manque de main-d’oeuvre : « Cette pénurie qui frappe la province depuis plusieurs années devient de plus en plus aigüe », regrette Clémence Joly, analyste des politiques à la Fédération Canadienne de l’Entreprise Indépendante(FCEI). « Nous arrivons à un point où des entreprises refusent des contrats voire annulent des ventes par manque de moyens humains. D’après notre étude, les pertes pour les entreprises québécoises s’élèvent à 10,7 milliards $ en un an! »
Un enjeu électoral
Les élections provinciales approchent. Selon un sondage de la FCEI, les attentes des entrepreneurs s’articulent à hauteur de 77% autour de mesures prioritaires afin de contrer la pénurie de main-d’oeuvre. Clémence Joly insiste : « Des solutions existent comme l’immigration voire les crédits d’impôts pour l’aide à l’embauche ou en faveur du retour au travail pour les personnes de plus de 60 ans. Il ne faut pas pénaliser les seniors qui souhaitent effectuer une activité professionnelle. Concernant l’immigration, les traitements administratifs sont bien trop lents! On en a besoin maintenant! Pas dans trois ans! »
La demande est insistante parmi les acteurs du tissu économique québécois : « Les attentes sont communes du côté des employeurs comme des employés », poursuit la spécialiste. « Les entreprises veulent embaucher des personnes d’expérience et les retraités veulent revenir dans le monde du travail. Il est aussi possible de créer des bonifications à des fins de formation ou de rétention à l’emploi. Au deuxième trimestre de 2022, 255 000 postes étaient vacants au Québec! La pénurie de main-d’oeuvre est l’enjeu de l’heure mais 69% de nos membres estiment que les partis politiques n’y portent pas suffisamment attention. » Les prochains débats seront suivis de près sur ce sujet avant le vote prévu le 3 octobre.