Le cap des 15 $ dépassé
Le salaire minimum augmentera de 7 % le 1er mai, soit la hausse la plus importante au Québec depuis plus de vingt ans. Les négociations débuteront désormais à 15,25 $ de l’heure, au minimum. Une décision qui ne ravit pas tout le monde.
Le phénomène d’inflation concernant les prix des biens de consommation, des taux de marge de crédit, des coûts de matières premières, ou encore la pénurie de main-d’œuvre compliquent la tâche de bon nombre d’acteurs de l’économie québécoise. Devant la difficulté de boucler les fins de mois chez les employés payés au salaire minimum, le gouvernement a décidé de relever ce dernier à 15,25 $, soit une augmentation de 1 $ de l’heure.
» Évidemment, nous sommes contents pour les personnes concernées et nos clients. (…) Cela n’empêche pas que nos frais vont augmenter. » – Nathalie Boucher
Stéphane Brin, conseiller du syndicat FTQ Montérégie, n’est pas complètement satisfait de la mesure. « Nous réclamions plutôt 18 $ l’heure. Nous nous sommes battus à 15 $ de l’heure par le passé, mais déjà qu’en 2020, ce n’était plus suffisant, n’en parlons pas pour 2023! Une personne travaillant 40 heures par semaine devrait pouvoir boucler son budget sans problème. Il n’est pas normal de constater que des travailleurs à temps plein doivent aller combler leurs besoins de première nécessité dans les banques alimentaires. »
Des frais supplémentaires
Du côté du centre communautaire Aux sources du Bassin de Chambly, les dirigeants sont mitigés concernant cette mesure. « Évidemment, nous sommes contents pour les personnes concernées et nos clients, assure Nathalie Boucher, directrice administrative. Chez nous, les salariés sont au-dessus du salaire minimum. Cela n’empêche pas que nos frais vont augmenter. En ajoutant la pénurie de main-d’œuvre, une concurrence existe entre les différents centres communautaires. Les salaires se dirigent encore vers la hausse. »
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) défend les intérêts des PME. Dans son rôle, elle révèle une certaine inquiétude concernant une mesure qui devrait coûter 2 600 $ supplémentaires par année pour chaque employé au salaire minimum. « Les PME n’ont pas de répit, estime François Vincent, vice-président Québec de l’organisation. Les hausses des coûts s’enchaînent depuis un an et les entrepreneurs n’ont pas de portefeuille magique faisant apparaître des billets de banque. Cela fragilise les petites entreprises qui ne peuvent pas, autant que les grandes, absorber les hausses et qui risquent de perdre des clients à cause d’une trop grande augmentation de leurs prix. Il faudrait que le gouvernement du Québec accompagne cette augmentation du salaire minimum de mesures d’atténuation, comme des allègements fiscaux sur la masse salariale. La FCEI rappelle qu’il est nécessaire d’inclure les PME dans le bouclier anti-inflation. »
Un compromis
Annoncée à la mi-janvier, la mesure a été justifiée par Jean Boulet, ministre du Travail, qui souhaite trouver un compromis entre tous les partis de la société. « Nous le savons, les défis liés au marché du travail sont grands : la pénurie de main-d’œuvre et la progression rapide des salaires en font foi. Le contexte économique que nous traversons actuellement nécessite que nous posions des gestes concrets afin d’améliorer le pouvoir d’achat des personnes à faible revenu tout en respectant la capacité de payer des petites entreprises, surtout en région. Je suis convaincu que la hausse du salaire minimum que j’annonce aujourd’hui fait partie de ces initiatives et qu’elle favorisera la participation des Québécoises et des Québécois au marché du travail pour ainsi contrer le fort taux de postes vacants qui demeure actuellement. » Près de 300 000 travailleurs sont concernés.