Climat en Montérégie : des défis en agriculture
L’hiver exceptionnellement doux qui sévit actuellement en Montérégie pose des doutes sur les pratiques agricoles. L’écosystème de la vallée du Richelieu pourrait vivre des bouleversements.
De mémoire de citoyen de la région de la Vallée-du-Richelieu, l’hiver 2024 fait partie des moments exceptionnels en termes de douceur des températures. « Nous constatons 42 % de couverture de neige en moins que la moyenne de la période 1991-2021, remarque Caroline Charron, conseillère à l’aménagement du territoire à la Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de la Montérégie. Nous essayons d’élaborer différents scénarios climatiques sur la Vallée-du-Richelieu et cet hiver 2024 colle à nos prévisions pour la période 2041-2071. »
« Normalement, mi-février compte ses moments de grand froid et leur absence amène différents enjeux. » – Caroline Charron
Selon MétéoMédia, les températures sont rarement descendues sous la barre des -15 degrés en janvier. Les prochains jours pourraient suivre cette norme. « Normalement, mi-février compte ses moments de grand froid et leur absence amène différents enjeux, poursuit Caroline Charron. La neige protège les cultures pérennes du gel, c’est-à-dire qu’actuellement, en cas de chute des températures, le foin ou autres herbes permanentes peuvent voir leur mortalité s’accroître à -15 ou -20 degrés. »
Aucune certitude
Dans un écosystème modifié, d’autres défis viennent perturber le mode de fonctionnement des agriculteurs. « Normalement, les insectes migrent au printemps et meurent en hiver, poursuit la conseillère. Cette fois, ils peuvent survivre et devront être plus nombreux sur les cultures. Pour éviter plus de pertes au moment des récoltes, il faudra certainement augmenter l’utilisation de produits phytosanitaires. Concernant l’élevage, il faut désormais veiller au taux d’humidité dans les bâtiments pour éviter les moisissures. »
Ce changement climatique possède son lot d’inconnus. Caroline Charron et les spécialistes de l’UPA souhaitent envisager les comportements à adopter, mais la tâche s’avère difficile, voire impossible pour le moment. « On privilégie des tendances, assure-t-elle. On assistera à davantage de périodes de gel/dégel, les précipitations prendront davantage la place de la neige, les températures vont encore augmenter avec des épisodes de pluie plus intenses l’été. Même si je n’ai jamais assisté à un tel redoux en hiver, des tempêtes peuvent encore se manifester en mars. »
Des fermes pilotes
Si la douceur se confirme et que la terre devient accessible, les agriculteurs pourraient-ils anticiper la plantation de leurs semis dans l’année? « S’il n’y a pas de gel tardif, on pourrait effectivement avoir une saison qui démarre plus tôt, estime Caroline Charron. Mais nous constatons aussi une présence toujours nombreuse de bernaches dans le secteur et elles se dirigent vers les semis. Elles pourraient générer des pertes importantes. »
Pour en savoir plus sur l’adaptation du climat en Montérégie, des fermes pilotes ont été installées sur le territoire et sont encadrées par les professionnels de l’UPA. « Le projet Agriclimat a pour but de mieux comprendre les effets des changements climatiques en agriculture et de mettre en œuvre les meilleurs moyens d’y faire face, affirme la conseillère. Nous voulons des fermes résilientes face aux changements climatiques avec un bilan carbone le plus faible possible. »
Le mois dernier, l’UPA a souligné l’engagement de plusieurs agriculteurs en faveur de leurs pratiques tournées vers l’écologie en leur versant des bourses.