Chambly : vers une nouvelle organisation agricole

Les communautés nourricières pourraient devenir un modèle agricole dans l’avenir. Jérémie Letellier, président de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de Montérégie, accueille favorablement l’idée.

Qu’est-ce qu’une communauté nourricière? « C’est un programme en environnement permettant d’accéder à l’autonomie et à la sécurité alimentaires pour une région » précise René Audet, professeur au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale à l’UQAM.

« L’idée est de créer des dynamiques au niveau local avec des jardins communautaires, des circuits de distributions alternatifs et des mobilisations de prix pour les familles dans le besoin. » – René Audet

Pour Jérémie Letellier, président de l’UPA Montérégie, les communautés nourricières pourraient être un modèle dans l’avenir en Montérégie. « C’est un dossier intéressant, même si nous ne nous sommes pas encore particulièrement penchés dessus. Elles proposent un lien intéressant entre la ferme de proximité et les citoyens. Cela peut favoriser l’achat local. Aussi, il faut éduquer la population sur la protection de nos terres agricoles, car il faut de la surface pour cultiver. À mon avis, toutes les solutions sont bonnes pour développer l’agriculture de proximité et amener une prise de conscience. »

Des solutions

Il n’est pas possible de cultiver à l’air libre à l’année en Montérégie, mais Jérémie Letellier pense que des méthodes sont envisageables. « On pourrait développer de nouvelles manières, assure-t-il. La culture de serre serait une solution et nous sommes déjà en retard par rapport à l’Ontario. Les syndicats locaux de l’UPA pourraient se pencher sur la question, en tout cas nous n’y voyons pas d’inconvénient. »

René Audet enseigne dans un nouveau programme de l’UQAM concernant « l’environnement nourricier ». « C’est une première au Canada avec ce vocable, assure l’enseignant. Les communautés nourricières sont une réponse aux signaux d’alarme donnés par les scientifiques. On veut promouvoir ce concept qui veut qu’une communauté puisse s’organiser autour des enjeux d’alimentation et d’agriculture. L’objectif final est de pouvoir garantir à la population un accès à une nourriture saine et à une sécurité alimentaire. »

Pour développer des moyens humains dans ce domaine, René Audet énumère les besoins. « Dans le programme universitaire, on retrouvera du droit, de la compétence en occupation des sols et de la capacité à mobiliser les gens dans des activités participatives. L’étudiant devra suivre quatre cours comprenant des enjeux agroalimentaires et de banque alimentaire tout en suivant un projet d’expérimentation. »

Pour l’enseignant, cette nouvelle organisation pourrait naître rapidement. « On pourrait se nourrir davantage par nous-mêmes en étant un peu plus imaginatifs. Il existe beaucoup de monocultures sur de grands espaces et plusieurs de nos productions sont vouées à l’exportation. On pourrait se diriger vers plus de diversification. Les changements climatiques risquent de bouleverser notre agriculture. Mais avec notre énergie pas chère, pourquoi pas alimenter des serres? »

Agir dès maintenant

Les tensions commerciales avec les États-Unis pourraient bien faire avancer le projet plus vite que prévu. « Notre politique agricole est bipolaire avec un certain protectionnisme et une exportation de masse, poursuit René Audet. L’idée est de créer des dynamiques au niveau local avec des jardins communautaires, des circuits de distributions alternatifs et des mobilisations de prix pour les familles dans le besoin. Cela peut donner lieu à des politiques municipales. »

Pour y parvenir, l’enseignant évoque aussi la protection des terres agricoles. « L’urbanisation est un problème lorsqu’il y a un débordement sur les terres agricoles. Aussi, on le voit bien dans le dossier Northvolt, dans lequel le discours était de récupérer les zones humides perdues sur des terres agricoles. Il faut être plus ferme pour les protéger. »