Chambly : 5 500 km à vélo dans La Très Ostie de run
Le Chamblyen Paul Hudon revient de ce périple de quatre mois à vélo dans les maritimes, 5 500 kilomètres plus tard, dans ce qu’il a baptisé La Très Ostie de run.
Paul Hudon est parti de Chambly à vélo à la fin du mois de mai. Il est revenu quatre mois plus tard à son point de départ, après 5 500 km. « Ce n’est pas aussi dur que ce que l’on croit. On avance petit peu par petit peu, tous les jours », affirme le cycliste.
L’homme n’en est pas à ses premiers coups de pédale. Dans le passé, il s’est notamment rendu à Gaspé, à Kegaska, à New York, à Boston, à la baie James ainsi qu’au Honduras. « La sensation de rouler, c’est le bon rythme. C’est mon moyen de transport, mon moyen de plaisir », situe-t-il. Il refuse toutefois de se définir comme un athlète. « C’est un appel. Il faut que je parte », identifie l’homme simplement.
Itinéraire à la carte
Le Chamblyen a planifié son itinéraire à l’aide d’une carte routière au Viridi Café. « J’aime déplier, voir le truc », dit-il. Il l’a consultée tout au long de sa route afin de constater concrètement sa progression. Il a franchi Terre-Neuve/Labrador, Nouvelle-Écosse, Île-du-Prince-Édouard et Nouveau-Brunswick. C’est d’ailleurs en sol néobrunswickois qu’il a souligné son soixantième anniversaire.
Il raconte que ce qui est « ressorti » de son voyage, c’est l’idée de la résistance. « En société, on se fait dire que l’on ne peut pas résister, on lâche prise. Mais c’est correct de résister, de s’accrocher, sinon c’est de baisser les bras », estime Paul Hudon. Il fait le parallèle entre cette « résistance » et les copropriétaires du petit café du Vieux-Chambly, Audrée Boisvert et Lea Londero, qu’il place au centre de son aventure. « Pour moi, c’est une résistance à ce que l’on voit sur le boulevard Taschereau, où tout est aplani, aplati, comme partout ailleurs. Il n’y a pas grand résistance là-dedans », tisse-t-il comme lien.
Paul Hudon est parti du 45e parallèle. Sur sa route, À Churchill Falls, il a atteint le 53e parallèle, le point le plus nordique de son trajet. « C’est beaucoup d’isolement. Tu n’as aucune infrastructure. Tu n’as aucune aide extérieure. Les socialisations sont rares », convient-il. Il mentionne cependant que dans ces coins reclus, les humains qui le croisent s’enquièrent de son état au passage. À travers cette solitude, le temps de réflexion n’est pas ce qui manque. Avant de partir, il lit, notamment de la poésie, et écoute de la musique qu’il emmagasine mentalement. Ces deux aspects habitent son esprit sur la route.
Une route « terrible »
De Baie-Comeau à Fermont se dresse la route 389. Paul Hudon indique n’avoir jamais vu une route aussi « terrible ». « Ça grimpe, ça grimpe. Quant t’arrives en haut, tu n’es jamais en haut. À chaque virage, tu penses que c’est le dernier, il n’y a plus de place dans le ciel! » image-t-il. Le cycliste parle d’être « constamment dans l’effort » pendant plus de 200 km, jusqu’au barrage de la centrale Manic-5. « Et après, c’est pire. Tu tombes dans la garnotte pendant 100 km », ajoute-il. Habitué à s’enfiler de 110 à 120 km par jour, il a vu sa cadence chuter à environ 30 km quotidiennement lors de ce segment. « Le nombre de kilomètres par jour, c’est le territoire qui décide. »
À ce moment, il a songé à tout laisser tomber. Puis, en fouillant dans son sac, il a mis la main sur le couteau suisse que lui avait remis son ami Richard Cossette. Cette trouvaille lui a insufflé la force de résister. « Mon chum Richard représente du courage et de la force. Ça m’a comme donné un boost et je me suis dit que je n’abandonnerais pas. »
Attention aux ours
Dans sa traversée, Paul Hudon s’est immiscé dans l’habitat naturel de plusieurs bêtes sauvages. Un orignal majestueux a eu la surprise de voir ce cycliste téméraire. En Nouvelle-Écosse, sur la Cabot Trail, il a aperçu un ours non loin de lui. « Ça ne m’effraie pas. Ça dépend des circonstances. La peur ne fonctionne pas quand on est dans l’action », considère-t-il. À la baie James, un autre ours est passé tout près alors que Paul Hudon roulait. « J’avais l’impression de le surprendre. Il a filé dans le bois. Moi, j’ai arrêté. Je ne continue pas, car je ne veux pas déclencher le réflexe de prédateur. »
Au Labrador, un homme à bord d’une camionnette l’a informé de la présence d’une meute de loups quelques kilomètres plus loin sur la route. L’homme au volant l’observe depuis plusieurs années.
Un soir, la tente du cycliste s’est brisée. Il estime que l’usure en est possiblement la cause. Au même moment, un oiseau de proie l’a pris en grippe. Paul Hudon est pourtant consciencieux d’où il installe son campement. « Trouver un spot pour bivouaquer, il y a des étapes à suivre. Tu commences par vérifier s’il y a de la marde d’ours ou des traces animales. Tu ratisses le secteur. Tu identifies les sons aussi avant d’entrer dans la tente », soutient-il.
« Horrible », répond Paul Hudon quand on lui parle des mouches. « Ça a été de loin le plus gros problème. Ça a fait que je ne pouvais pas arrêter prendre des pauses. C’était impossible, je me faisais manger. Je n’avais jamais vu ça », décrit-il. Même à une bonne vitesse, des mouches l’ont poursuivi. « Puis, à un moment donné, elles s’écœurent, j’imagine, et ne me suivent plus. »
L’homme résistant a frappé de forts vents frontaux et plusieurs saisons en une seule et même journée. Les moments de découragement sont survenus en route. « Souvent, on se dit que c’est la dernière (longue route), que c’est fini », remarque Paul Hudon. Pourtant, il songe déjà à sa prochaine.
