Carignan : un développement urbain sous contraintes
Des résidents de Carignan réclament des infrastructures pour faciliter et sécuriser leur quotidien. Mais certaines mesures sont compliquées à mettre en place.
Plusieurs habitants des rues Henriette, Lareau et Bouthillier, à Carignan, tiennent le même discours. Interrogés sur l’état de la chaussée, ils réclament des aménagements piétons et/ou une piste cyclable afin de pouvoir circuler sereinement.
Des souhaits raisonnables à première vue, mais difficilement réalisables d’un point de vue municipal.
« Carignan possède 102 kilomètres de rue dont 30 % sont étroites, soit six mètres de largeur ou moins, fait remarquer Diane Morneau, conseillère municipale. Ces voies sont d’anciens rangs agricoles très linéaires. Lorsque la ville a hérité de la rue Bellevue de la part du gouvernement, il n’y avait pas d’accotement. »
La solution serait alors d’élargir ces artères où des habitations sont établies à proximité. « Cela pourrait signifier des expropriations de certains propriétaires ou des pertes de parcelles de terrain, poursuit Diane Morneau. Les gens n’en ont pas toujours conscience, que leur terrain puisse se terminer plusieurs mètres avant la route. » De plus, les installations publiques nécessitent un coût. « Le financement de la première construction est imputable aux propriétaires terriens concernés, poursuit l’élue. Ensuite, la rénovation ou les coûts d’entretien sont à la charge de la Ville par le biais du fonds général. »
Pragmatique
Dans un contexte économique difficile pour plusieurs ménages, Carignan ne veut pas alourdir le fardeau des taxes. « Les habitants de la rue Gertrude paient encore le coût de la construction de cette voie, tout comme les rues Lareau et Bouthillier, assure la conseillère municipale. Nous avons estimé que ce n’est pas le moment d’en rajouter à la facture, d’autant que leurs assises sont encore en bon état. On ne va pas casser ce que l’on vient de construire. Sur la centaine de kilomètres de rues étroites, on pourrait implanter une piste multifonctionnelle pour cyclistes et piétons. »
Parmi les travaux, la rue Henriette a été ciblée par l’équipe municipale. « Elle fait partie des priorités, poursuit Diane Morneau. Tous les cinq ans, on vérifie l’assise et la structure des rues. Mais on ne refait pas une rue aussi facilement. Il faut vérifier le drainage, ainsi que le volume et la circulation de l’eau. On ne pourra pas la faire en une fois et, chaque fois, il faudra bloquer la circulation. »
Outre sa réalité rurale, Carignan fait partie de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM). À ce titre, elle doit se conformer à plusieurs règles et principes. « Nous bénéficions des plus belles terres agricoles au Québec, poursuit Diane Morneau. Ainsi, la CMM exige que leur capacité de culture augmente. Nous devons aussi respecter un certain seuil de canopée. Il est donc interdit aux agriculteurs de couper des arbres en bordure de leurs champs. »
Une volonté freinée
Par sa proximité avec l’île de Montréal, Carignan hérite aussi d’un rôle économique. « Nous accueillons des travailleurs. Cela amène de la densification, poursuit la conseillère. Aussi, un tronçon entre les rues Henriette et Gertrude a été recyclé en piste verte pour les vélos. Mais la CMM y songerait pour faire un projet de transport en commun. Pour cela, elle nous demande de faire de la densification dans le quartier afin de rentabiliser la manœuvre. Cela pourrait être une réalité dans vingt ans ou soixante ans. Personne ne le sait. »
Ainsi, la Ville de Carignan souhaite prendre tout de même son destin entre ses mains. « On veut créer un centre-ville dans un nouveau secteur, confie Diane Morneau. Il est plus facile de partir de zéro que de déformer des quartiers. On essaie d’influencer le Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) afin de permettre aux villes de travailler. Nous avons tous de belles intentions, mais notre réalité est ainsi. »